La mémoire tatouée : le trauma de la décennie noire en Algérie dans l’œuvre de Sadek Aissat

ذاكرة موشومة: صدمة العقد الأسود في الجزائر في أعمال صادق عيسات

The tattooed memory: the trauma of the black decade in Algeria in the work of Sadek Aissat

Sarah Slimani

Citer cet article

Référence électronique

Sarah Slimani, « La mémoire tatouée : le trauma de la décennie noire en Algérie dans l’œuvre de Sadek Aissat », Aleph [En ligne], 7 (3) | 2020, mis en ligne le 13 novembre 2020, consulté le 21 décembre 2024. URL : https://aleph.edinum.org/3048

La décennie noire est considérée comme un des événements les plus marquants en Algérie, les traumas que cette dernière a engendrés, autant dans l’inconscient individuel que collectif, sont indéniables. La littérature, lieu ayant de tout temps embrassé les blessures des êtres humains, ne saurait être indifférente à un événement de cette ampleur. La littérature algérienne des années quatre-vingt-dix-2000 foisonne d’écrits mettant en scène l’atmosphère chaotique de violence et d’horreur qui régnait en Algérie pendant cette période. L’œuvre de Sadek AISSAT est justement celle-là parmi tant d’autres qui porte les empreintes des épisodes douloureux de l’histoire algérienne. En revanche, elle se fait fort de mettre l’accent sur les blessures subies par les Algériens. Cet article analyse les empreintes narratives de ce trauma dans le texte de Sadek Aissat.

تعتبر العشرية السوداء احد اكثر الحقبات الزمنية إيلاما في تاريخ الجزائر المعاصر. الصدمات التي خلفتها هذه الفترة لازالت راسخة في أذهان الجزائريين. لذلك قام الأدب الجزائري بإعادة صياغة هذا الحدث الأليم الذي تفشى فيه العنف و العدوان. يهدف هذا المقال الى دراسة الآثار النصية لهذه الصدمة في كتابات الروائي الجزائري صادق عيسات

The black decade is considered one of the most striking events in Algeria, the traumas that it engendered, both in the individual and collective unconscious, are undeniable. Literature, a place that has always embraced the wounds of human beings, cannot be indifferent to an event of this magnitude. The Algerian literature of the nineties and 2000s is full of writings depicting the chaotic atmosphere of violence and horror that reigned in Algeria during this period. Sadek AISSAT's work is precisely this one among many others that bears the marks of the painful episodes of Algerian history. On the other hand, it focuses strongly on the wounds suffered by the Algerians. This article analyzes the narrative traces of this trauma in the text by Sadek Aissat.

«  Comment ne pas se perdre dans les dates, les exils, les famines, les épidémies et les malheurs  ?  » Sadek Aissat

Introduction

L’histoire de l’Algérie est scandée d’événements douloureux et d’épisodes extrêmes. La conquête coloniale et ses multiples répressions, les insurrections successives, la guerre d’indépendance, la décennie noire constituent autant d’expériences dont les sociologues et les psychanalystes s’accordent à reconnaître l’ampleur des traumas, notamment collectifs. Dans ce registre, la décennie noire est considérée comme l’un des épisodes les plus traumatiques.

La décennie noire en Algérie a mobilisé les plumes de la majorité des écrivains tant la situation était dramatique. L’écriture de cet événement variait entre le besoin de témoigner et le désir d’extérioriser un mal si terrible. Contrairement à ses contemporains cependant, Sadek AISSAT1 s’était attardé non sur l’événement lui-même, mais plutôt l’écriture des blessures engendrées par de telles horreurs.

L’objet du présent article est d’interroger les manifestations narratives de cette blessure psychique nommée trauma. Il s’agira, dans un premier temps, de voir dans quelle mesure l’expérience de la décennie noire a été traumatogène, et dans un second temps, d’étudier la manière dont le trauma s’inscrit dans l’œuvre de Sadek Aissat.

À cet effet, nous définirons d’abord l’essence de l’événement traumatogène et ses séquelles, nous tenterons ensuite de démontrer que l’expérience de la guerre est porteuse d’un immense potentiel traumatique, enfin nous analyserons les traces du trauma de la décennie noire à travers les romans de Sadek Aissat.

1. Prolègomènes

1.1. Événements traumatogènes

Dans son Au-delà du principe du plaisir, Freud définit le trauma comme étant «  Toutes excitations externes assez fortes pour faire effraction dans la vie psychique du sujet  » (Freud, 1920 : 68). Le trauma est donc un choc émotionnel important, directement lié, le plus souvent, à une situation externe. Le sujet vit une déstabilisation extrême et une perte des repères qui lui garantissaient la gestion de sa vie psychique. C’est lors d’un événement menaçant son intégrité physique et/ou psychique que l’individu prend conscience du danger mettant en péril son équilibre. Les événements vécus, souvent majeurs et inattendus, ébranlent les compétences psychiques de gestion des situations d’urgence et engendrent un état de sidération absolue. Ces situations sont justement «  porteuses de sens et vécues comme une rupture et un enjeu : rupture par rapport à la continuité du passé, enjeu comme annonce des changements potentiels importants  ». (CROCQ 1999:  249)

À partir de ces définitions, nous pouvons cerner l’importance de l’événement qui est à l’origine du choc traumatique, ce qui nous pousse à nous interroger sur sa nature, son ampleur et son inscription dans notre corpus.

Il serait intéressant de s’attarder sur deux aspects importants de la question : l’aspect subjectif, inhérent aux prédispositions psychiques de l’individu faisant face à l’événement, et les caractéristiques dudit événement.

Au niveau subjectif, le principe de vulnérabilité individuelle est essentiel, il se définit comme :

«  un état de moindre résistance aux nuisances et agressions et rend compte de la variabilité interindividuelle. En sciences humaines, le terme de vulnérabilité (du latin : blesser) désigne des individus comme étant vulnérables du fait de leur prédisposition à une maladie, à un dommage ou à une issue négative. » (Anaut, 2002 : 289)

Marie Anaut soutient que les individus sont dotés de prédispositions psychiques, qui, mobilisées lors d’une expérience extrême, accentuent le choc traumatique.

Ces inclinations peuvent être liées au passé de l’individu [situation familiale, enfance, événements vécus par le passé, éducation des parents ou encore expérience éducative], comme elles peuvent être intrinsèques à sa personnalité (fragilité, difficultés à gérer des situations nouvelles, manque de confiance en soi…). L’événement traumatisant est générateur de traumatisme pour le sujet qui le vit, tandis qu’un événement traumatogène est susceptible d’engendrer un trauma selon les prédispositions psychiques du sujet.

Les études sur le trauma ont, dès lors, modifié l’orientation, car il ne s’agit plus d’interroger l’événement à l’origine du choc émotionnel dont est victime le sujet, mais plutôt d’analyser le rapport établi entre l’événement et le sujet. La réaction de la victime et sa capacité à intérioriser son effroi déterminent la nature traumatique de cette épreuve. De ce fait, nous comprenons mieux la divergence des réactions qu’éprouvent les sujets face à un seul et même événement : au moment où l’un affiche un état de sidération et parfois d’hystérie, l’autre se montre tout à fait calme. Toutefois, il ne faudrait pas négliger l’aspect latent du trauma, celui-ci pourrait en effet demeurer «  caché  » dans l’inconscient du sujet pour réapparaître quelques jours ou même quelques mois plus tard.2

Après une catastrophe naturelle ou un quelconque événement relevant de l’extrême, des experts sont dépêchés sur les lieux afin d’assurer une prise en charge psychologique des victimes, de détecter les cas de chocs traumatiques avérés et de limiter leurs effets.

Aussi, est-il intéressant de distinguer entre un événement émotionnellement choquant et un événement traumatogène. Si l’aspect traumatique du premier événement n’est pas à discuter, du fait de sa capacité à troubler l’équilibre cognitif et émotionnel de l’individu, le second événement répond aux critères de l’expérience traumatique, mais s’articule également en fonction de la subjectivité des victimes.

1. 2. La guerre

La guerre est un des événements les plus traumatogènes de la vie psychique du sujet. Accompagnée de son lot d’horreurs, la guerre engendre un trauma, le plus souvent insurmontable.

Le XXe siècle semble être un des siècles les plus sanglants de l’histoire de l’humanité. Guerres, colonisations, guerres de libération, guerres civiles… Les victimes se comptaient par centaines de milliers. Les survivants, considérés comme chanceux, se devaient de tourner la page, horrible, de leur Histoire. Ceux qui n’étaient pas atteints de blessures physiques visibles ne pouvaient prétendre aux statuts de victimes. Pourtant, aujourd’hui, il s’avère indéniable que les effets invisibles de la guerre sont d’une très grande gravité. Les organismes de prise en charge des victimes de guerre ont démontré que la blessure psychique engendrée par la guerre est souvent plus profonde que les blessures physiques.

Les sujets ayant vécu cet événement ne sauraient oublier cette réalité qui continue à les hanter des décennies après. En effet, le réel vécu pendant la guerre est marqué par une dimension traumatogène. Qui place les survivants dans un tourbillon de symptômes psychiques relevant d’une véritable blessure. La proximité avec la mort accule le sujet à se représenter cette dernière, or, la représentation de la mort est absente du système psychique, ce qui cause une situation de vide, de peur et de sidération.

Or, toute cruelle qu’elle soit et sans doute à cause de cela, la guerre devient une source de création et de créativité pour les survivants qui veulent témoigner des horreurs vécues. Ils se mettent à reproduire, artistiquement pour la plupart, une réalité impensable, indicible. L’expérience de la guerre est « de tout temps une machine source de mythes, de tapisseries, de peintures, de théâtre et d’écritures. Une vraie filmographie, une immense bibliothèque et une avalanche de problèmes à penser la condition humaine.  » (Cyrulnil 2014 : 14)

Ainsi, la guerre suscite le besoin de créer un univers autre, dans lequel le sujet retrouve un certain pouvoir sur les événements. La narration permet de réduire le sentiment d’impuissance face aux tragédies humaines ressenties par les victimes. L’expérience traumatique suscite nombre de questionnements, l’homme interroge son existence dans ses aspects éthiques et philosophiques, et la littérature s’avère être le lieu le plus fécond pour ce dialogue. Les textes littéraires tentent de discerner et de cerner l’inexprimable, mais aussi de répondre aux questions tapies/enfouies dans l’inconscient de la victime.

Dans cette optique, la littérature algérienne constitue un espace privilégié qui a eu le mérite de dire et de témoigner des blessures et des cicatrices laissées par les guerres algériennes. C’est donc naturellement qu’elle a fait de la guerre, dans ses divers aspects, un point de rupture, qui ne saurait laisser le sujet indifférent.

L’œuvre de Sadek Aissat est justement celle-là parmi tant d’autres qui portent les empreintes des épisodes douloureux de l’histoire algérienne, colonisation, guerre de libération puis indépendance. La particularité de l’œuvre de cet auteur est qu’elle s’attarde peu sur l’entreprise coloniale comme sur la guerre de libération nationale. En revanche, elle se fait fort de mettre l’accent sur les blessures subies par les Algériens. Écrite et publiée en pleine guerre civile, l’œuvre romanesque de Sadek Aissat, est en effet imprégnée des douleurs de la décennie noire, bien plus qu’elle ne l’est des blessures engendrées par la colonisation et par celles de la guerre de libération.

2. La décennie noire

Événement à fort potentiel traumatogène, la guerre laisse des traces indélébiles dans la psyché des victimes et le feu qu’elle déclenche dans la vie intérieure des victimes et parfois des bourreaux, ne s’éteint que très rarement. D’un point de vue psychologique, toutefois, ce sont les guerres civiles qui sont les plus désastreuses.

La guerre civile s’avère plus dangereuse au niveau psychique que les autres guerres, aussi dramatiques soient-elles, et ce pour plusieurs raisons. Les luttes intestines qui évoluent en guerres civiles s’articulent, le plus souvent, entre les membres d’une même communauté, parfois même les membres d’une même famille, ce qui ébranle complètement les liens de proximité, le sentiment d’appartenance et de sécurité que garantit la famille. C’est dans cette optique que ces guerres sont jugées par la sociologue André Dessornes comme étant les plus «destructrices sur les plans psychologique et sociétal, par le fait même que des gens d’un même village, d’un même quartier ou au sein même d’une famille s’affrontent pour des raisons qui dans un certain nombre de cas peuvent totalement leur échapper.  » (Dessornes 1995 : 122)

Ainsi, le sujet se retrouve dans une situation extrême à cause d’un autre sujet, qui lui est pourtant très proche et en lequel il avait confiance. En outre, la guerre civile pose avec persistance, la question de l’altérité. Lorsque les antagonistes sont censés être le Même, appartenir au même groupe, les représentations psychiques du Même et de l’Autre sont diffuses et ne répondent plus aux exigences inconscientes de la relation. Comme l’a expliqué DUPRAZ, la guerre civile demeure une crise des représentations. (Dupraz 2015 :322-325)

Toutefois, il est judicieux de rappeler que, dans le cadre de cet article, nous nous intéressons plus à l’avènement d’une situation extrême et à sa juxtaposition dans le texte littéraire, qu’à sa définition sociopolitique. D’un point de vue psychologique, cette décennie et tout ce qu’elle a impliqué, à court, à moyen et à long terme sont considérés comme une blessure profonde de l’histoire de l’Algérie contemporaine.

2.1. Scénographie d'une parole traumatique : une violence à l'oeuvre

Sadek Aissat met en scène cette décennie en passant des événements douloureux au drame national, il revient d’abord sur les conditions sociopolitiques qui ont constitué un terreau fertile aux germes de la violence. Il convie le lecteur à chercher dans les profondeurs abyssales de la crise, en lui faisant côtoyer les personnages dont il lui fait vivre les blessures et les déceptions, suivre les trajectoires qui les font basculer vers l’horreur. Au-delà de la description, des expériences internes notamment, l’auteur de La Cité du précipice met en œuvre une multitude de procédés littéraires afin de mettre en scène, ou en récit, les expériences vécues par ses personnages et d’en rapprocher les lecteurs, entre autres  ; la symbolisation. En effet, le trauma étant une blessure engendrée par un événement douloureux, la personne traumatisée se retrouve dans l’incapacité d’exprimer la réalité telle quelle, car celle-ci lui échappe et constitue un véritable élément de blocage psychique. Ainsi, un des procédés cathartiques les plus idoines est justement la symbolisation  ; en effet, l’usage du langage symbolique, le plus souvent métaphorique permet de reprendre le contrôle sur l’événement et de pouvoir se le représenter. C’est dans cette optique que notre texte foisonne de figures de style renvoyant à la douleur insupportable des personnages.

Dans son texte, l’auteur décrit des âmes troublées, meurtries, que des concours de circonstances acculent à l’extrême «  plus on pleure, et plus on a le courage d’être cruel.  » (Aissat, 1995, P. 174), métaphore du lien indéfectible entre la souffrance et l’horreur. Sadek Aissat met en exergue la dimension humaine de la cruauté en avançant que l’être humain ayant été blessé par la vie pouvait devenir capable du pire. Sans justifier un quelconque acte, mais sans le condamner non plus, l’auteur cerne la blessure de ses personnages. Il décrit les circonstances précaires telles que la pauvreté, le chômage, la bureaucratie qui vont être à l’origine de la crise politique en Algérie. À titre d’exemple, citons l’un des personnages de L’Année des chiens : Salim, qui incarne le personnage du terroriste. L’auteur le décrit comme un homme cruel et sans âme, mais aussi comme homme blessé par la vie :

Il avait quitté l’école depuis longtemps et avait perdu l’espoir de trouver du travail  ; pourtant il espérait faire les vendanges en Espagne ou en Italie, comme beaucoup de jeunes du quartier, et amasser de l’argent qu’il changerait au noir en monnaie locale pour s’acheter un bout de terrain en bord de mer et Aissat construire une petite maison, si Dieu le voulait, acquérir même une barque. […] il pourrait alors demander sa main à son père. (Aissat 1995 : 76)

Cet extrait nous montre à quel point le désespoir régnait en maître absolu dans les quartiers populaires. L’usage du mot «  espoir/espérait  » deux fois dans une même phrase en dit long, car il s’agit là d’une figure de style  ; la répétition, permettant ainsi de mettre la lumière sur un élément absent en le citant plusieurs fois. L’auteur entreprend de décrire les ambitions d’un jeune homme de condition modeste, que les difficultés de la vie accablent, mais qui se bat pour réaliser une certaine stabilité. Mais les conditions de vie sont telles que le personnage ne tarde pas à perdre espoir. Il Aissat est acculé à cause de l’inanité de ses efforts, il finit par succomber :

Le temps passa, mais Salim ne put réunir la somme nécessaire pour son voyage à l’étranger. Son rêve le poursuivait et le minait. Il ne buvait jamais de vin, mais commença à prendre des barbituriques. Je remarquai plus souvent ses yeux vides, comme des boules ternes. (Aissat 1995 : 76)

Profonde et métaphorique, cette phrase de notre corpus démontre à quel point le poids que portait ce personnage devenait de plus en plus lourd. Le vide dans les yeux exprimerait, selon nous, la perte de tout espoir d’une vie meilleure, l’adjectif «  terne  » fait penser à l’absence de lumière, ce qui renvoie à la vie terne et sans espoir de ce personnage. En effet, le parcours de Salim est des plus compliqués. Menacé de mort par des jeunes du quartier, il s’exile clandestinement en Italie. Mais durant son absence, sa mère cède à la folie et sa sœur à la prostitution. À son retour, il ne retrouve ni famille ni amis. Il n’a plus qu’une seule issue, se réfugier dans le cocon de la religion : «  Salim se mit à faire du marché noir et fréquenter assidûment mon frère qui l’entraîna vers la mosquée. Puis, il se laissa pousser la barbe. Il ne me parlait presque plus  ». (Aissat 1995: 83)

Le cas de Salim n’est pas du tout singulier, la désillusion guette toute une jeunesse qui n’attend qu’une porte de sortie. La vie n’a offert aucun cadeau à ces jeunes dont Salim «  était loin d’être le seul paria du quartier.  » (Aissat 1995 : 89). Le mot «  paria  », assez fort, utilisé par l’auteur fait référence à la situation dramatique que vivaient ces jeunes  ; il les compare à des individus hors caste, méprisés, rejetés et écartés du groupe. Cette métaphore, très significative, met l’accent sur une situation sociale extrêmement délicate.

Similaire au parcours de Salim, un autre personnage, dans le second roman de Sadek Aissat, La cité du précipice, met en relief le poids du passé dans la construction des personnalités des personnages Aissatiens. Hamid, frère du personnage principal du roman  ; Boualem, qui dès son jeune âge, a eu à subir les affres de la société traditionnelle et de l’institution éducative archaïque. Enfant, Hamid avait écrit un mot d’amour à une de ses petites camarades, mais la missive avait été découverte par l’enseignant, Sidi. Ce dernier en fit une question d’honneur et mobilisa toute son énergie pour démasquer l’auteur de la lettre et lui infliger la punition idoine. Les extraits qui suivent décrivent l’état de peur et d’effroi dont a été victime le petit garçon :

Hamid sait qu’il n’en a plus pour longtemps. La Kalachnikov reposant à son côté, il attend l’obus qui le fera sauter, exploser, disparaître. Il voudrait être désintégré, que rien ne reste de lui, qu’on puisse rapporter à Zohra dans un cercueil plombé. De toute façon, le temps pour lui s’est arrêté depuis ce jour-là, ce jour où sidi avait décidé qu’il en serait ainsi. […] AHBK. Il l’avait massacré et piétiné dans la cour, sous les yeux de Ghania et de tous les enfants de l’école. Est-ce ce jour-là qu’il cessa de rêver d’oiseaux fous  ?  (Aissat 1998 : 242)

Cet extrait met en scène l’atrocité de cet épisode qu’a vécu le personnage étant enfant. L’image qui nous est transmise à travers «  est-ce ce jour-là qu’il cessa de rêver d’oiseaux fous  ?  » renvoie à la rupture causée par cet événement dans l’esprit de l’enfant. Ce jour-là, il a vu ses petits rêves brisés. Parler «  d’oiseaux fous  » évoque justement les rêves de liberté, mais aussi l’innocence que possèdent naturellement les enfants. Cette histoire, d’apparence banale, avait, selon les différents extraits l’ayant évoqué dans notre corpus, marqua la fin de l’univers enfantin du personnage et le début de la violence, car ce fut là un des épisodes les plus troublants de sa vie. En effet, étant très jeune, cet enfant a été incapable d’intégrer cet événement et la blessure qui lui a été infligée semble avoir été indélébile. Depuis ce jour, l’enfant avait changé d’attitude et s’était réfugié dans la religion, seule protection qui s’offrait à lui, dans ce monde cruel, comme l’avait expliqué Greg Galissot «  Incontestablement, à partir des années quatre-vingt, l’Islam s’installe puissamment dans la cité comme force de contestation du pouvoir. L’idéologie religieuse devient dominante donc légitimante  ». (Galissot 1986 : 53).

2.2. Sémiologie d'un espace de parole confisqué

L’espace public a été de plus en plus investi par l’islamisme politique. Les jeunes désœuvrés, déçus pour la plupart, vivant une situation de grave précarité, trouvaient en cette ultime alternative, le refuge absolu, la solution définitive à tous leurs problèmes matériels et sociaux. Ils se laissaient bercer par la quiétude de la fatalité. Sadek Aissat en fait la parfaite description :

Alors que nous nous apprêtions à entrer dans l’âge adulte, qu’une nuit de trouble au goût de gros rouge nous surprit sur les bords du trottoir, Djaafar Essadeq parla de Dieu. Jamais, jusque-là, Dieu n’avait été évoqué sur le bord d’un trottoir. Nous ne fûmes pas choqués, seulement un peu surpris. Et plus tard, lorsqu’on ferma les portes de la vie sur nos visages, nous tentâmes de forcer celles du ciel. (Aissat 1995 : 38)

Pendant la décennie noire, seul le langage du sang, de la violence et de la terreur a été véhiculé. La scène sociale était devenue une arène où tout un peuple était retenu en otage. Le spectacle qui s’offrait aux observateurs n’était guère un plaisir pour les yeux. Le taux de violence et d’atrocité atteint pendant cette période, pourtant assez brève sur l’échelle historique, semble avoir atteint son paroxysme. Le choc de telles situations ne saurait être léger, et pour cause, les bourreaux n’étaient autres que les frères, les cousins, les proches… les victimes étaient des enfants, des femmes, des vieillards, personne n’a été épargné par l’ouragan de la terreur qui a sévi en Algérie. Cet événement représente une véritable blessure narcissique pour l’inconscient collectif, et cela à différents niveaux. D’abord, cette décennie noire était un aveu arraché de force à la nation algérienne de l’échec de sa gouvernance, de sa gestion politique et même de son indépendance. Mais aussi une blessure d’ordre narcissique : l’Algérien est très attaché à cette image véhiculée qui le décrit comme étant très solidaire avec ses concitoyens, cette guerre a ébranlé cette image puisque les Algériens se sont entre-tués, mutilés et détruits. L’horreur Aissat avait dépassé tout entendement, comme l’affirme Farid Alilat, journaliste et chroniqueur algérien :

Fauché par le souffle d’une bombe, un gosse gît à même le sol, presque entièrement nu, le corps disloqué. Un homme en costume est recouvert d’un linceul blanc et d’un bout de l’emblème national taché de son propre sang. Un passant emporte dans ses bras le corps en lambeaux d’un enfant. Une main s’approche du visage d’un autre enfant sans vie et lui ferme les yeux pour l’éternité. Une couverture est jetée sur une fillette et un bambin allongé dans une morgue. Des cadavres sont emportés à la hâte sur des civières, tandis que les flammes consument des voitures devant le commissariat central d’Alger. Des corps mutilés d’hommes et d’enfants sont alignés dans une cour d’école d’un village perdu de l’Algérie profonde. (Alilat 2017: 23)

Ces images d’une violence extrême décrivent la situation que vivait l’Algérie pendant cette période fatidique. Sadek Aissat, sans pour autant tomber dans le récit-témoignage, semble avoir pris suffisamment de recul vis-à-vis de ces événements et les décrit d’une manière sobre, mais très profonde, en mettant la lumière sur la blessure engendrée par tant d’atrocités, mais aussi sur la cicatrice que celle-ci laissera sans doute.

L’auteur de L’Année des Chiens aborde ces événements douloureux comme une rupture, la naissance d’une nouvelle ère. À travers notre analyse du texte, nous comprenons que la décennie noire est perçue comme étant une faille dans l’histoire du pays, un événement-choc, après lequel plus rien ne sera pareil. Effectivement, nous retrouvons une multitude de phrases qui soulignent cette fissure dans l’inconscient collectif algérien, et ce d’autant plus que l’agression provient des proches  ; «  Funeste ce jour où Salim me menaça. Mon frère ne broncha pas. La lame brilla, et une écharde d’acier creusa mes yeux, me fit un regard amer  » (Aissat 1995 : 32) métaphore de la violence extrême des événements qui allaient secouer le pays, l’écharde en acier fait référence à un aveuglement, une amertume qui demeurera ancrée dans toutes les mémoires. Nous retrouvons justement cette métaphore plusieurs fois dans le roman, cette répétition ne saurait être fortuite, car cet événement signa le début de l’horreur vécue par les personnages. Salim ayant été un ami de la famille, un confident et un ami très proche, son redressement contre le personnage principal fut un véritable choc, une rupture qui marqua la fin d’une ère. Cet événement a également marqué le début de la séparation entre les frères jumeaux  ; «  Mon frère ne broncha pas  » manifeste le désintérêt total du frère et son désengagement vis-à-vis de la famille, cette situation qualifiée de «  funeste  » est comparée à la mort, une mort symbolique.

«  Quand la lame du couteau de Salim brilla devant mes yeux, je pris conscience de l’horreur  » (Aissat 1995 : 32), cette phrase, à elle seule, résume métaphoriquement l’ampleur et la gravité de l’événement. La lame du couteau serait ici une métaphore de la menace de violence dont fut victime notre personnage, et à travers lui des pans entiers de la société algérienne. Ou encore «  Puis il Aissat eut cette lueur noire du couteau de Salim.  » (Aissat 1995 : 68), cette image fut répétée plusieurs dans le texte pour son rôle hautement symbolique  ; l’oxymore présenté dans l’alliance de deux mots aux sens contraires ou contradictoires «  lueur/noire  », car les valeurs sémantiques de ces deux mots sont aux antipodes. La relation illogique et inacceptable de ces deux mots renvoie, à notre sens, à la situation illogique, inacceptable et dépassant tout entendement dans laquelle le pays s’était retrouvé. Aussi, l’effet surprenant et inattendu qu’exerce cet oxymore sur l’esprit du lecteur rappelle justement les aspects surprenant et inattendu du trauma, ce qui nous permet d’avancer que cet événement fut un choc pour le personnage.

Salim était l’ami du personnage principal et de son frère, il était considéré comme très proche de la famille. Mais, ayant subi une mutation radicale, il intégrera le FIS et prendra le chemin de l’extrême. Sa première victime, qui était auparavant son meilleur ami et son confident. Cet épisode symboliserait, selon nous, le choc engendré par cette décennie, car les bourreaux ont été des proches ou des amis et se sont soudainement improvisés justiciers.

Aussi, la violence extrême par/laquelle était dépeinte l’atmosphère générale du pays pendant cette période a instauré une grande fragilité psychique, aussi bien sur le plan individuel que collectif. L’aspect anarchique et arbitraire des massacres perpétrés par les groupes terroristes semble avoir eu un grand impact dans la société algérienne. Cerner les contours du combat devenait de plus en plus difficile, les Algériens étaient désormais incapables d’anticiper, de prendre les devants  ; les événements douloureux frappaient toujours par surprise. En d’autres termes, l’effet de surprise était toujours au rendez-vous. Prenons comme exemple l’assassinat de «  double-tête  », personnage du premier roman de Sadek Aissat, un simple d’esprit, devenu fou au fil des jours  ;

Quand le pays sombra et que Salim fut tué par les soldats, les compagnons de celui-ci, pour le venger enlevèrent Double-tête et le décapitèrent. Son corps fut enterré sans la tête que l’on retrouva, plusieurs jours après, abandonnée devant la grille du cinéma le Ritz. (Aissat 1995 :. 78)

Cette phrase est fortement imagée, on Aissat retrouve plusieurs métaphores et autres figures de style. «  Le pays sombra  » renvoie au naufrage dont le pays fut victime. Autant symbolique que réel, le drame algérien fut horrible, le texte Aissatien ne cesse de décrire cette horreur. Cet extrait traduit l’horreur qui a régné en Algérie pendant cette période, mais aussi la banalité de ce mal. Il exprime également la colère de la population vis-à-vis de l’injustice de ces actes barbares. Personne ne fut épargné par ce tourbillon de violence, hommes, femmes et enfants étaient abattus sans distinction. L’espace public était complètement investi par les islamistes qui s’érigeaient en directeurs de conscience et dictaient aux autres leurs comportements et leurs attitudes, sous peine d’être assassinés. L’extrait suivant évoque justement cet aspect :

Le malheur le rattrapa et posa les doigts crochus de sa main noire et velue sur sa vie. Nabila commença par recevoir des lettres anonymes lui intimant l’ordre d’abandonner son travail et de porter le hidjab. Cela n’aurait sûrement pas dérangé Bob si sa femme avait adopté de son plein gré une pareille décision  ; dans sa famille, toutes les filles étaient voilées. Ensemble, ils refusèrent de céder aux menaces. Un jour elle fut enlevée, violée et égorgée. Elle était enceinte. (Aissat 1995 : 80)

L’allégorie que l’on retrouve dans la première phrase est fortement symbolique  ; l’auteur compare le malheur à un monstre qui posa ses doigts sur le destin de ses personnages. Cette image, en augmentant la consistance langagière de la phrase, a doté cette idée du malheur, pourtant abstraite, d’une grande consistance. Le lecteur devient alors capable de se l’imaginer, en chair et en os, et arrive à cerner toute sa gravité et à mesurer tout son poids. Dans cette optique, ce qui interpelle le plus le lecteur c’est l’impuissance de l’être humain vis-à-vis du mal, en effet, ces actes terroristes ne touchaient pas uniquement à l’intégration physique des victimes, les blessures étaient aussi bien psychologiques que physiques, car la peur et le sentiment d’insécurité s’étaient installés dans la psyché de l’Algérien. Il est à signaler que ces actes étaient plus destinés aux survivants qu’aux victimes, les objectifs premiers ayant été de toucher à la vie psychique des sujets. Le but des opposants islamistes était de s’imposer sur la scène sociale et politique algérienne, par la force si nécessaire, et d’instaurer de nouvelles normes et représentations sociales qu’ils avaient choisies.

Les extraits qui évoquent cette barbarie sont nombreux. Inspirés de faits réels et de témoignages de victimes, ils sont d’une extrême violence. Celle-ci par exemple ébranlerait l’équilibre psychique de quiconque  ; «  elle a pleuré, sa mère, son fils trahi par des assassins qui portent une ombre en guise de visage, quand on a rapporté des morceaux d’Azzouz dans un sac-poubelle noir, au fond d’un cercueil plombé.  » (Aissat 1998 : 217)

Par ailleurs, en décrivant le chaos, symbolique et réel, que vivait le peuple algérien pendant cette période, l’auteur a évoqué les victimes des deux côtés, dans un mouvement de transcendance de cette pensée binaire qui opposait «  les terroristes  » au peuple. En effet, en décrivant les souffrances des mères ayant perdu leurs fils, il ne distingue aucunement entre les douleurs :

Quelques femmes, fantômes drapés de blanc, sont assises à l’ombre des caroubiers et des oliviers, nouant leur âge stressé. Elles ont nettoyé les tombes de leurs disparus et versé de l’eau dans la petite coupe. Il fait chaud, et avec cette sécheresse, même les morts ont soif. […]. Zohra ne retrouvera certainement jamais la tombe de Hamid. Ira-t-elle, un jour, s’asseoir, elle aussi à l’ombre d’un olivier pour parler aux autres femmes, leur raconter l’histoire de son fils trahi  ? […]. Répéter des litanies bues jusqu’à la lie, des douleurs apprises par cœur. (Aissat 1998 :245)

L’auteur met sur le même piédestal les douleurs des mères, sans distinguer entre la nature ou la fonction de ceux qui ont été victimes ou bourreaux. Sadek Aissat parle de trahison, des deux côtés de la barrière, il utilise le même mot pour décrire Azzouz assassiné par les islamistes, et Hamid lui-même terroriste tué par les militaires  ; «  son fils trahi  ». Cette idée de la trahison évoquée par l’auteur pourrait faire allusion à la manipulation politique des antagonistes. Dans cette optique, beaucoup d’analystes ont développé l’idée que le trauma subi par les victimes était de la même nature, qu’elles soient d’un côté ou de l’autre de la barrière, ce que soutient Moussaoui Abderahmane :

Dans le combat commencé par les opposants islamistes contre le pouvoir en place en Algérie depuis 1992, dans chaque camp et surtout chez les larges couches de la population prise en otage, cette tragédie a causé la perte des biens et de repères. Ses victimes sont diverses et leurs traumatismes aussi : enfants, orphelins, femmes violées ou veuves, exode. Cependant, familles de rebelles ou des disparus continuent à s’opposer et à s’affronter. Pourtant, ici et là, le traumatisme cause le même ravage. (Moussaoui, 2003 : 134)

Aussi, nous retrouvons une description méticuleuse de certains personnages convertis à l’islamisme armé  ; Sadek Aissat les décrit parfois comme étant des victimes d’une histoire algérienne trop douloureuse, tout en mettant l’accent tantôt sur l’aspect pathologique de leurs actes, tantôt sur l’effet superficiel de la conversion  ; «  Je me sens mal, j’ai envie de sang, ça fait longtemps que je n’ai pas égorgé  ». (Aissat 1998 : 245) À travers cette phrase prononcée par un des personnages islamistes, nous comprenons que leurs attitudes sont loin d’être ordinaires ou normales et qu’elles sont empreintes d’un sadisme prononcé.

Le corpus regorge d’une multitude d’extraits décrivant l’atmosphère chaotique qui régnait en Algérie pendant cette période. La peur et la mort accompagnaient les Algériens dans leur vie quotidienne, provoquant en eux une grande fragilité, notamment psychique :

Hier, ça se passait tout près d’ici, à quelques centaines de mètres à vol d’oiseau. Un bruit de fin du monde et l’odeur âcre de la poudre ont envahi le quartier. Les pales d’un hélicoptère ont longtemps, lourdement, brassé l’air chauffé à blanc. Les gens ont eu peur. (Aissat 1998 : 177)

Les événements qu’a connus l’Algérie étaient tels qu’il est très difficile de panser les blessures engendrées. La structure sociale a été touchée de l’intérieur, et cela a causé une véritable crise de la représentation. Il est clair que cette période a été la matrice de traumas complexes qui ont conduit à l’établissement d’un édifice complexuel touchant à l’inconscient collectif. Le poids de ces années de braise est lourd à porter pour l’Algérie d’aujourd’hui, comme l’affirme Mohammed Arkoun :

Si Karl Max a pu dire à propos d’un conflit circonscrit à l’Angleterre et à l’Irlande que le «  poids des morts pèse très lourd sur le cerveau des vivants  », il semble, hélas, qu’on ne puisse plus le faire à propos des millions de morts innocents des guerres civiles qui ensanglantent le monde depuis 1945 - Vietnam, Cambodge, Indonésie, Inde, Pakistan, Iran, Irak, Liban, Algérie, Afrique… de quel poids ces morts pèsent-ils, qui crient justice sans que les vivants les entendent  ? C’est là une autre dimension de notre histoire tragique. En tant que fils de la terre d’Algérie, je ressens cette démission des vivants avec une douleur particulière. (Arkou, 2016, P. 135)

Pour finir, nous dirons que cet épisode de l’histoire de l’Algérie contemporaine peut être considéré comme le plus dramatique de tous. Des milliers de victimes, des dégâts matériels et une mémoire tatouée, tel est l’héritage laissé par cette «  décennie noire  ». L’Algérien pouvait difficilement sortir indemne de cette tragédie, car la blessure a été trop profonde. La littérature, comme tous les autres arts, est le lieu où s’articule cette blessure, elle s’y exprime et prend forme. À travers son œuvre, Sadek Aissat, loin du témoignage classique des survivants, pétrit son texte dans la douleur, fait revivre la blessure dans l’attente et l’espoir de la panser.

1 Sadek Aissat est né en 1953 à Alger. Sociologue de formation, journaliste (au Matin d’Alger, Révolution, Regard et l’Humanité), il était aussi et

2 Des témoignages en font acte lors de la guerre du Vietnam où d’anciens soldats de l’armée américaine se voient replongés dans un état de sidération

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ARKOUN, Mohamed, Joseph Maila, De Manhattan à Bagdad, Au-delà du bien et du mal, Tizi Ouzou, Ed. Frantz Fanon, 2016, P. 135.

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1 Sadek Aissat est né en 1953 à Alger. Sociologue de formation, journaliste (au Matin d’Alger, Révolution, Regard et l’Humanité), il était aussi et surtout un romancier ; L’Année des chiens(1995), La Cité du précipice (1998) et Je fais comme fait dans la mer le nageur (2002) sont les trois romans qui constitue son œuvre. Il quitte l’Algérie en 1991, et est décédé en 2005.

2 Des témoignages en font acte lors de la guerre du Vietnam où d’anciens soldats de l’armée américaine se voient replongés dans un état de sidération traumatique des mois après leur démobilisation. Cet état pourrait être le résultat d’un mécanisme de défense déployé par le système immunitaire psychique de l’individu qui pousse le sujet à omettre l’événement vécu et son extrême violence et à manifester un déni total ou partiel.

Sarah Slimani

Université de Boumerdès

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