La négation comme procédé de dramatisation de la situation sanitaire en Algérie

النفي كعملية تهويل للوضع الصحي في الجزائر

Negation as a process of dramatization of the health situation in Algeria

Samia Ilhem Nouadri

p. 435-445

Citer cet article

Référence papier

Samia Ilhem Nouadri, « La négation comme procédé de dramatisation de la situation sanitaire en Algérie  », Aleph, Vol 10 (3) | 2023, 435-445.

Référence électronique

Samia Ilhem Nouadri, « La négation comme procédé de dramatisation de la situation sanitaire en Algérie  », Aleph [En ligne], Vol 10 (3) | 2023, mis en ligne le 14 juin 2022, consulté le 28 mars 2024. URL : https://aleph.edinum.org/8879

Le discours journalistique comprend plusieurs genres. En effet, chaque type à ses propres caractéristiques, ce qui donne à chaque genre et à chaque article de la presse écrite un statut unique et distinct par rapport aux autres. Par conséquent, cette confidentialité est évidente dans la formulation visant à diffuser l'information. Le journalisme appelle un ensemble de processus rhétoriques qui aident à s'exprimer dans un contexte spécifique à travers un discours à la fois détaillée, explicite et implicite. Dans notre contribution, nous avons tenté de trouver des polymorphismes qui justifiaient les échos de plusieurs voix, virtuellement par la présence de deux énonciateurs dans un discours de presse. En effet, nous étions principalement concernés par la chronique, qui relève du quotidien Al-Watan (Algérien) sur la pandémie "Covide19". Cela signifie que ce types de médias peut nous aider à mener à bien notre étude de faire référence à la position informative des journalistes dans leurs discours. Cette dernière se situe entre l'effacement et l'obligation logique. En conséquence, le journaliste qui doit rapporter l'événement aux lecteurs est soumis à des restrictions médiatiques avec un objectif éthique et attractif

يشمل الخطاب الصحفي عدة أنواع. في الواقع، لكل نوع خصائصه الخاصة، والتي تمنح كل نوع وكل مقال في الصحافة المكتوبة مكانة فريدة ومميزة مقارنة بالآخرين. لذلك تتجلى هذه السرية في الصياغة التي تهدف إلى نشر المعلومات. تدعو الصحافة إلى مجموعة من العمليات الخطابية التي تساعد على التعبير عن الذات في سياق معين من خلال خطاب يكون في نفس الوقت مفصلاً وصريحًا وضمنيًا. في مساهمتنا، حاولنا إيجاد تعدد الأشكال الذي يبرر أصداء العديد من الأصوات، تقريبًا من خلال وجود اثنين من المتحدثين في خطاب صحفي. في الواقع، كنا قلقين بشكل رئيسي من الوقائع، التي تنقل من يومية الوطن (الجزائرية) حول وباء "كوفيد 19". وهذا يعني أن هذا النوع من الوسائط يمكن أن يساعدنا في إجراء دراستنا من خلال الإشارة إلى الموقف الإعلامي. الصحفيين في خطاباتهم. يقع الأخير بين المحو والالتزام المنطقي. نتيجة لذلك، يخضع الصحفي الذي يجب عليه إبلاغ الحدث للقراء لقيود وسائل الإعلام بهدف أخلاقي وجذاب.

Journalistic discourse encompasses several genres. Indeed, each type has its own characteristics, which gives each genre and each article of the written press a unique and distinct status compared to the others. Therefore, this confidentiality is evident in the wording aimed at disseminating information. Journalism calls for a set of rhetorical processes that help to express oneself in a specific context through discourse that is at the same time detailed, explicit and implicit. In our contribution, we tried to find polymorphisms which justified the echoes of several voices, virtually by the presence of two enunciators in a press speech. Indeed, we were mainly concerned by the chronicle, which reports from the daily Al-Watan (Algerian) on the pandemic "Covide19". This means that this type of media can help us to carry out our study by making reference to the position informative reporters in their speeches. The latter is situated between erasure and logical obligation. As a result, the journalist who must report the event to readers is subject to media restrictions with an ethical and attractive objective.

Introduction

Articulée autour de textes journalistiques conçus comme « une mosaïque de voix » S. Moirand (2009 : 85), cette étude, consacrée à la polyphonie négative qui structure par le truchement de ses marqueurs les chroniques hebdomadaires du quotidien El-Watan, vise à montrer les procédés de dramatisation de la crise sanitaire, la covid-19, en Algérie.

Inscrite dans le sillage des travaux de Bakhtine (1970), Ducrot (1984) et Fairelough (1992), l’étude de la négation présentée ici révèle le dialogisme qui travaille en profondeur tout discours et dont l’usage

«  peut rendre le texte moins clair, voire ambigu, beaucoup plus que ne le peut l’affirmation. […] La réfutation (la mise en scène d’un point de vue réfutant et du point de vue réfuté) lui sert dans sa visée principale, qui est celle d’énoncer la position du journal sur différents événements dans le but de persuader ses lecteurs. La stratégie argumentative opérée par la négation “ne” consiste à présenter (présupposer) des points de vue tout en les réfutant; […] Présenter différents points de vue, mais avant tout faire passer aux lecteurs un point de vue subjectif ». (M. Roitman 2006 : 5)

Soucieux de respecter les formes et les exigences déontologiques que suppose le genre du texte journalistique, le locuteur - scripteur mobilise des structures énonciatives qui lui permettent d’inscrire son opinion, de focaliser sur tel ou tel point de vue, de le relativiser, de le réfuter ou de l’admettre comme seul vrai.

1. Le corpus

Le corpus de cette étude est exclusivement constitué d’extraits des chroniques du journal El Watan parues pendant en pleine pandémie de la covid-19 durant la période allant du mois de février au mois d’août 2020. Le journal présente lui-même sa « position intransigeante » comme

« mise en évidence quotidiennement, elle n’est pas négociable et ne l’a jamais été. Sur d’autres choses, le quotidien juge sur pièces. Quand une bonne décision est prise par le président de la République ou son gouvernement, elle est relayée, voire saluée, et lorsqu’elle est négative, le journal ne se gêne pas pour la critiquer et la dénoncer. Les a priori ne peuvent avoir leur place. »1

Il a été, dans une perspective taxinomique, procédé à un relevé systématique des phrases à la forme négative qui configurent les chroniques retenues pour construire une typologie et déterminer les effets de sens produits en fonction des lieux de leur énonciation. La représentation synoptique qui suit présentera les occurrences observées et leur récurrence.

Formes de la négation

Occurrences

Taux

Ne… pas

23

1,61 %

Ne

57

3,99 %

Ne… plus

11

0.77 %

Ne… jamais

10

0,07 %

Ne… ni… ni

02

0,14 %

Ne… rien

04

0,28 %

Ne… toujours

02

0,14 %

=100 %

Même si l’on constate un relatif déséquilibre des différentes occurrences dont certaines sont moins fréquentes que d’autres, leur répartition au fil des chroniques est constante. Elle reflète en cela « la position intransigeante » du journal de se constituer en vitrine des points des points de vue et de se draper ainsi des apparats de l’objectivité.

2. Analyse des extraits

2.1. La négation comme procédé sémantique

La négation est un phénomène syntaxique (constructif) ou sémantique qui révèle des différences d’arrangement sémantique et grammatical. Ces différences renvoient à la description négative suggérée par la théorie polyphonique du « ne… pas ». En fait, le sens et la structure grammaticale de la phrase ou de la composante négative sont tous des éléments pertinents de l’interprétation de la fonction de négation dans l’énoncé journalistique dont la portée dépend de propriétés et de règles sémantiques et grammaticales. Ces éléments sont représentés par des expressions numériques et des lexiques sur une échelle de termes opposés et de verbes au subjonctif qui représentent deux phénomènes affectant la polyphonie dans le discours nié.

En procédant à l’analyse de contenu prenant en charge le dictum et le modus2 (Bally 1965), il a été aisé de constater à la suite d’Anscombre et de Ducrot que la négation polémique met en scène deux points de vue au niveau de la signification. Dans ces chroniques, les auteurs usent de la négation surtout pour créer une polémique telle que le montrent les extraits suivants :

Les extraits ci-dessous sont tirés des chroniques « Angoisse au pluriel »

Extrait n° 1 :

« Les dégâts sont là, aujourd’hui, pour attester de sa nocivité meurtrière. Et le cauchemar continue puisque, à ce jour, les parades les plus pointues mises à exécution dans différents pays n’ont pas réussi à endiguer cette incroyable offensive virale. Bien sûr qu’il y a le confinement (partiel ou intégral) pour limiter la casse et, d’après les professionnels de la santé, qui reste pour le moment la seule et unique arme de défense pour se préserver, mais cette solution qui doit s’appliquer massivement — sinon elle serait vaine — ne va pas sans générer d’autres problèmes aussi complexes à résoudre parce que dépendant de considérations sociétales somme toute vitales. Rester chez soi est en effet facile à dire, mais le faire sans traumatisme psychologique, c’est une autre paire de manches même si on n’a pas le choix d’agir autrement. »

Pdv1. Les parades les plus pointues mises à exécution dans différents pays n’ont pas réussi à endiguer cette incroyable offensive virale

Pdv 2. les parades les plus pointues mises à exécution dans différents pays ont réussi à endiguer cette incroyable offensive virale parce qu’elles ont les moyens et les capacités financiers.

Extrait n° 2 :

« Même si on n’a pas le choix d’agir autrement »

Pdv1 : même si on n’a pas le choix d’agir autrement

Pdv2. Même si on a le choix d’agir autrement parce qu’on a les moyens autant humains que financiers. (l’implicite)

Extrait n° 3 : « Les enfants sont ainsi, incontestablement, les grandes victimes de ce confinement, cette mise en “quarantaine” obligatoire, qu’ils n’arrivent pas à cerner ni à justifier. »

Pdv1 : « Les enfants sont ainsi, incontestablement, les grandes victimes de ce confinement, cette mise en “quarantaine” obligatoire, qu’ils n’arrivent pas à cerner ni à justifier. »

Pdv2.  « Les enfants sont ainsi, incontestablement, les grandes victimes de ce confinement, cette mise en “quarantaine” obligatoire, qu’ils arrivent à cerner et à justifier » parce qu’ils ont grandi avant l’âge comme on dit. Ils ont pris coutume aux mensonges et à la souffrance. (l’implicite)

Extrait n° 4 :

« Pour eux, c’est comme une punition pour une faute qu’ils n’ont pas commise »

Pdv1 : «  Pour eux, c’est comme une punition pour une faute qu’ils n’ont pas commise »

Pdv 2 : « Pour eux, c’est comme une punition pour une faute qu’ils ont commise  parce qu’ils sont encore trop jeunes pour comprendre ce qu’est un système sanitaire faible. » (l’implicite)

Extrait n° 5 :

« Ce n’est pas une mince affaire, il faudrait s’inventer des méthodes de pédagogue pour s’en sortir »

Pdv1. « Ce n’est pas une mince affaire, il faudrait s’inventer des méthodes de pédagogue pour s’en sortir »

Pdv2 : « C’est une mince affaire parce qu’il faudrait s’inventer des méthodes de pédagogue pour s’en sortir ». (l’implicite) Qui peut inventer les méthodes pédagogiques pour sauver des générations traumatisées par le confinement? On n’a ni les moyens ni les bonnes personnes.

Extrait n° 6 :

« D’autant que tous les enfants ne sont pas lotis à la même enseigne. »

Pdv1 : « Tous les enfants ne sont pas lotis à la même enseigne. »

Pdv2 : « Tous les enfants sont lotis à la même enseigne parce qu’ils subissent tous le même sort du confinement »

Extrait n° 7 :

« Il n’y a pas de solution miracle, il faut tout simplement résister, endurer l’épreuve avec courage et dignité en pensant que, bientôt, tout ne sera qu’un mauvais souvenir »

Pdv1 : « Il n’y a pas de solution miracle, il faut tout simplement résister, endurer l’épreuve avec courage et dignité en pensant que, bientôt, tout ne sera qu’un mauvais souvenir »

Pdv2 : « Il y a une solution miracle, il faut tout simplement résister, endurer l’épreuve avec courage et dignité en pensant que, bientôt, tout sera qu’un mauvais souvenir » parce que les choses se passent de cette façon en Algérie (l’implicite)

2.2. Les liens énonciatifs entre les êtres discursifs et les points de vue

Les opinions exprimées dans les textes sont censées être quelque peu explicitement liées à des objets rhétoriques, et ces connexions sont de différents types. Les connexions qui ont lieu entre le locuteur et les différents points de vue sont les plus importantes pour l’étude polyphonique. Les liens avec lesquels nous travaillons dans cette étude sont les liens de responsabilité, les liens de responsabilité et les liens de contrat (Nølke 1994a, p.150). En tant que locuteur rhétorique responsable de la parole, le locuteur est et se rapporte donc automatiquement à attacher la responsabilité à certains éléments du langage (négation, conditions épistémologiques, vues présentées par les liens, mais dues à enfin, même, etc.). D’un autre côté, la pertinence de l’accord est liée à d’autres éléments du langage (vues facilitantes ou causales fournies par les liens bien que, bien sûr, depuis, lors, etc.). Les opinions exprimées dans les textes sont censées être quelque peu explicitement liées à des objets rhétoriques, et ces connexions sont de différents types. Les connexions qui ont lieu entre le locuteur et les différents points de vue sont les plus importantes pour l’étude polyphonique. Les liens avec lesquels nous travaillons dans cette étude sont les liens de responsabilité, et les liens de contrat (Nølke 1994a, p.150). Et parce que le locuteur rhétorique est responsable de la parole, le locuteur est donc automatiquement associé à lier la responsabilité à certains éléments du langage (négation, conditions épistémologiques, vues fournies par les liens, mais en raison de, enfin, même, etc.). D’autre part, il a une relation démesurée avec d’autres éléments du langage (vues facilitantes ou causales fournies par des liens bien sûr depuis lors, etc.). L’orateur « donne ce point de vue » (Nølke 1994a, p. 150). Enfin, l’orateur rapporte en rapportant l’irresponsabilité à d’autres éléments du langage (poète 1 de la négation, discours représentatif, journalisme conditionnel, etc.); Il se distancie de ces vues (Nølke 1994a, p. 150). Et selon les instructions données par la négation, comme nous l’avons dit, le locuteur se présente comme responsable du pdv 257. Il se présente, en revanche, comme non responsable du Pdv 1 :

« Le Covid-19 a imposé sa loi. Il nous met sur la défensive dans un combat par trop inégal puisqu’il a l’avantage de l’initiative! Et gare à celui qui ne le prend pas au sérieux, le sous-estime ou l’ignore carrément. »

Pdv 1 : (non associé au locuteur), « le Covid-19 a imposé sa loi. Il nous met sur la défensive dans un combat par trop inégal »

pdv 2 : (associé au locuteur), « le Covid-19 a imposé sa loi. Il nous met sur la défensive dans un combat par trop égal. » Le pdv 1 est injustifié.

Dans (l’extrait n), nous dirons que le locuteur réfute le pdv 1, selon lequel « le Covid-19 a imposé sa loi. Il nous met sur la défensive dans un combat par trop égal. » Plus précisément le fait que quelqu’un aurait pu dire que « le Covid-19 a imposé sa loi. Il nous met sur la défensive dans un combat par trop inégal. » Il y a ainsi un lien de responsabilité reliant le locuteur et le pdv 2, et un lien de non-responsabilité, plus précisément de réfutation, reliant le locuteur et le pdv 1 de l’énoncé nié.

Ainsi, la deuxième étape de l’analyse polyphonique est de créer la composition polyphonique. La formation se situe au niveau de la parole et est l’interprétation de la mise en scène, par le locuteur, des connexions entre objets discursifs et points de vue. Il s’agit de relier les vues exprimées à des objets discursifs susceptibles d’être à l’origine de ces vues, en identifiant les connexions parlées. Ce n’est qu’au niveau de la configuration que nous pouvons définir qui est responsable de pv1 à partir de la négation. Voici un exemple avec une voix collective :

« En cette période où la barbarie intégriste frappait aveuglément, on n’était pas sûr de revenir le soir quand on quittait la maison le matin.  Aujourd’hui, on a cette terrible appréhension quand on sort faire les courses ou se rendre à son travail pour ceux qui peuvent encore le faire, de ramener le virus chez soi, au sein de sa famille. De ramener en fait un danger de mort sans le savoir. »

Pdv 1 : (associé à la voix collective) « on était sûr de revenir le soir quand on quittait la maison le matin. »

Pdv 2 : (associé au locuteur) « n’était pas sûr de revenir »

ici, la voix collective est marquée par « on » et les citoyens. Contrairement au locuteur, le « on » et les citoyens sont d’avis que « quand on quittait la maison de ramener en fait un danger de mort sans le savoir. »

Le pdv 1 est ainsi, selon les indications du (con) texte, associé par un lien de responsabilité à la voix collective. Le pdv 2 est associé par un lien de responsabilité au locuteur qui prend en charge le pdv 2 et réfute par là le pdv 1. L’expression « Au contraire » constitue ici un marqueur de polyphonie qui explicite, au niveau de la configuration, le lien de responsabilité entre le locuteur et le pdv 2 imposé au niveau de la structure.

L’objet rhétorique est responsable d’une part, et d’autre part, dans le cadre de son propre discours. Souvent, le lecteur est représenté par vous ou par d’autres panneaux indiquant que la parole est directement dirigée vers lui. Quant au phonème collectif, il peut être représenté par des pronoms on, nous, ceux, ils, etc., et il peut être désigné par une expression privilégiée, une construction impersonnelle, un idiome ou une présupposition. Les exemples suivants nous permettent de mieux comprendre le fonctionnement de ces liens :

« En cette période où la barbarie intégriste frappait aveuglément, on n’était pas sûr de revenir le soir quand on quittait la maison le matin. » Aujourd’hui, on a cette terrible appréhension quand on sort faire les courses ou se rendre à son travail pour ceux qui peuvent encore le faire » article (angoisse au pluriel. A, Merrad 16 avril 2020)

« On aura beau respecter scrupuleusement les consignes de base pour se sentir un tant soit peu en sécurité, rien à faire : le doute est omniprésent. Cela nous rappelle un peu la période du terrorisme, nous dit un homme de communication, mais dans un contexte différent. »

Nous remarquons dans ces exemples que la différence entre la voix collective et les autres êtres discursifs réside dans le fait que le locuteur, l’allocutaire et la troisième personne sont susceptibles de « prendre la parole » dans le texte. En ce sens, le pronom « on » représente un collectif composé d’individus pouvant prendre la parole.

Pour notre étude, il nous semble nécessaire de garder une catégorie (la troisième personne) pour les unités représentant des personnes identifiables (par leur nom : Teboune, par leur fonction : président, ministre, etc.) et une autre catégorie (la voix collective) pour les unités qui représentent indirectement des personnes : on, nous, ceux, eux.

Afin d’expliquer la composition polyphonique, il nous semble important de nous intéresser aux connexions parlées présentes dans notre groupe qui relient les êtres discursifs aux vues exprimées dans les textes. Ces connexions sont établies entre le porte-parole de la presse et les différents points de vue pertinents pour l’étude polyphonique à travers :

  • Les liens de responsabilité qui sont clarifiés par l’utilisation de certains éléments du langage (négation, conditions épistémologiques, vues données par les liens, mais, pourtant, car, enfin, même, etc.).

  • Les connexions de l’irresponsabilité sont illustrées par les éléments du langage (le pdv 1 de la négation, le discours représenté, le conditionnel.)

  • Les liens d’accord qui sont illustrés par d’autres éléments de langage (les points de vue concessifs ou causaux introduits par les connecteurs bien que, certes, puisque, etc.)

Les rapports du déni montrent que le porte-parole de la presse est responsable de pdv 2, non responsable de pdv 1.

L’exemple qui suit permet de comprendre l’articulation des deux points de vue :

« Si on se réfère au calendrier établi par la commission des experts médicaux qui assume une grande responsabilité sur les assurances données pour que le déconfinement soit plus une source de désinhibition que de tourments supplémentaires » (article 04/06/2020)

Pdv 1 : (non associé au locuteur) : « que le déconfinement soit plus une source de désinhibition que de tourments supplémentaires » 

Pdv 2 : (associé au locuteur) : "que le déconfinement soit plus une source d’inhibition que de tourments supplémentaires.” 

Dans cet énoncé, le locuteur-journaliste réfute le pdv 1, selon lequel « les experts médicaux qui assume une grande responsabilité sur les assurances données pour que le déconfinement soit une source de désinhibition» et nie le lien de responsabilité qui relie le locuteur-journaliste et le pdv 2, et le lien de non-responsabilité, plus précisément de réfutation, reliant le locuteur et le pdv 1 de l’énoncé nié.

Conclusion

En somme, dans cet article, nous avons voulu exposer un compte rendu d’une explication de la négation polémique dans un groupe de presse. Cela concerne certains signes grammaticaux, sémantiques et contextuels, voire une combinaison des trois. Cette forme de négation structure le discours journalistique qui porte dans ses caractéristiques les conditions d’émergence de la polyphonie et de sa mise en spectacle.

Notons aussi, loin de l’actualité, que les sons rhétoriques ne correspondent pas directement aux voix du monde. Étant des entités discursives, ce sont toutes des voix construites avant tout et souvent organisées avec une intention rhétorique. Cependant, certains de ces sons modulés correspondent indirectement à des êtres réels. En ce sens, le chroniqueur constitue une véritable voix, qui ne concerne pas seulement l’autorité polyphonique du texte, le locuteur, mais aussi, par intrusion au niveau textuel, devient le porte-parole d’une communauté plus large. Ainsi, le chroniqueur est le véritable gestionnaire des voix des clients qu’il manipule quand il le souhaite. Au fur et à mesure qu’il se classe et se donne l’image qui lui convient, nous avons également pu montrer que l’utilisation de la négation dans sa fonction polyphonique constitue une stratégie dialectique dans les éditoriaux qui répondent à des contraintes générales et situationnelles. Le plus important est de persuader vos lecteurs. Ainsi, l’usage de la négation polyphonique peut être considéré comme une activité générale liée aux éditoriaux de la presse quotidienne. Le monde de la négation est infini. Nous ne sommes ni les premiers ni les derniers à le voir, et nous ne nous soucions pas non plus des multiples aspects de cette entité qui existe dans toutes les langues naturelles et qui opèrent à tous les niveaux de la communication humaine.

1 https://www.elwatan.com/edition/actualite/balise-el-watan-tebboune-et-les-internautes-04-05-2020

2 La position et l’attitude tenue par le locuteur envers son propre discours

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Maingueneau Dominique, 2012 Analyser les textes de communication, 2e éd Armand Colin, Paris.

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www.elwatan.com/.../chronique-de-a-merad/angoisse-au-pluriel-16-04-2020

www.elwatan.com/.../chronique-de -a-merad/Tout est meilleur chez nous 02-04-2020 

www.elwatan.com/.../chronique-de -a-merad/Santé à trois vitesses? 09-04-2020

www.elwatan.com/.../chronique-de Le rituel et les intégristes : Reda Bekkat 25 juillet 2020

www.elwatan.com/.../chronique-de Le coronavirus et nous 26 mars 20 A Merrad

www.elwatan.com/.../chronique-de Déconfinement à multiples risques A. MERAD 04 juin 2020

1 https://www.elwatan.com/edition/actualite/balise-el-watan-tebboune-et-les-internautes-04-05-2020

2 La position et l’attitude tenue par le locuteur envers son propre discours

Samia Ilhem Nouadri

Centre Universitaire de Barika

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