Communication électronique et insécurité linguistique : le cas des Facebookeurs algériens

التواصل الإلكتروني وانعدام الأمن اللغوي : حالة الجزائريين مستخدمي الفيسبوك

Electronic communication and language insecurity: the case of Algerian Facebookers

Kerboua Ferial et Bourkaib Saci Naoual

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Référence électronique

Kerboua Ferial et Bourkaib Saci Naoual, « Communication électronique et insécurité linguistique : le cas des Facebookeurs algériens », Aleph [En ligne], 8 (3) | 2021, mis en ligne le 27 septembre 2021, consulté le 21 décembre 2024. URL : https://aleph.edinum.org/4607

Notre recherche relève du champ scientifique de la sociolinguistique. Elle s’inscrit dans une démarche visant à cerner la notion d’insécurité linguistique dans le contexte de communication électronique. À partir d’une enquête par questionnaire proposé à différents groupes algériens francophones sur le réseau social Facebook, elle tente, selon une analyse mixte (quantitative et qualitative) des réponses collectées, de saisir les manifestations du phénomène en mettant en exergue ses indices et d’identifier les aspects qui le déterminent. L’objectif de cette entreprise est d’apporter peu ou prou des explications, parmi d’autres, aux difficultés de la communication rencontrées par les Algériens lorsqu’ils utilisent le français écrit sur les plateformes de réseaux sociaux.

ينتمي بحثنا إلى مجال علم اللغة الاجتماعي. هو جزء من نهج هدفه دراسة فكرة انعدام الأمن اللغوي في سياق التواصل الإلكتروني. بناء علي استبيان تم نشره على بعض المجموعات الناطقة بالفرنسية على شبكة التواصل الاجتماعي يحاول وفقا لتحليل مختلط (كمي/ نوعي) للإجابات التي تم جمعها, التعرف على مظاهر الظاهرة عن طريق إبراز علاماتها وتحديد الأسباب التي تتحكم بها. الهدف من هذا العمل هو تقديم بعض التفسيرات، من بين عدة أخرى، لصعوبات الاتصال التي يواجهها الجزائريون عند استخدام اللغة الفرنسية المكتوبة على منصات التواصل الاجتماعي.

Our research belongs to the sociolinguistic field, its aim is to study the notion of linguistic insecurity in the context of electronic communication. Through the analysis of a survey that was posted on some French speaking groups, it tries, according to a mixed analysis (quantitative and qualitative) of the responses collected, to identify the manifestations of the phenomenon by highlighting its signs, and to identify the causes that control it. The objective of this work is to provide some explanations, among others, to the communication difficulties faced by Algerians when using written French on social media platforms.

Introduction

Aujourd’hui, la langue française présente depuis presque deux siècles en Algérie fait partie de son paysage sociolinguistique et y occupe « une place importante » (Grandguillaume 2000). Elle est utilisée dans l’enseignement supérieur et la recherche scientifique, le milieu professionnel, l’économie, le monde des médias, des arts, de la littérature, ainsi que dans le parler quotidien des algériens dans toutes les situations d’énonciations (Taleb-Ibrahimi 1995, Benrabah 1999, Chachou 2013). C’est donc tout naturellement que cette langue est utilisée dans les nouveaux espaces d’échange qu’offrent les réseaux sociaux numériques2.

Si certains internautes algériens ont du français une pratique quelque peu éloignée des normes du français standard, d’autres défendent farouchement le français normé dans leurs échanges à travers les sites de discussion. Smai donne un aperçu sur les réactions de certains internautes algériens envers ceux qui commettent des « fautes » de français en ligne : « [Exemple (12) : le français s’il vous plaît et le bon, c’est honteux.] » (Smai 2016 : 267)

En partant de ce simple exemple, nous nous demandons pourquoi est – il important pour cet internaute algérien, dans un cadre aussi informel qu’un espace de discussion, d’écrire en français correct et d’exiger le respect de la norme linguistique ?

Nous convenons, en référence aux travaux de Labov (1966), que l’effort conscient de corrections et les réactions fortement négatives du locuteur envers sa façon de parler proviendraient d’un sentiment d’insécurité linguistique. Sous cet angle, nous voulons en élargissant l’échantillon des communications établies en français écrit sur les médias sociaux numériques, passer en revue les manières à travers lesquelles l’insécurité linguistique se manifeste dans les comportements langagiers du locuteur algérien. En prenant le cas de Facebook comme terrain d’enquête, nous formulons notre question de recherche comme suit : « comment se manifeste l’insécurité linguistique chez le Facebookeur algérien ? Et quelles en sont les causes ? »

Pour y répondre, nous prendrons appui sur une enquête par questionnaire destiné à des Facebookeurs francophones algériens en vue de rendre compte de l’existence de ce phénomène chez les sujets observés et de détecter les causes qui le favorisent. Nous voulons donc observer l’activité épilinguistique3 pour rendre compte du rapport qu’entretient le sujet algérien avec les langues pratiquées sur la toile (la sienne et celle des autres). Nous analyserons les représentations des utilisateurs de Facebook sur les comportements langagiers selon la méthode empirico-inductive qui consiste à comprendre « les phénomènes à partir d’un tissu de données, plutôt que de recueillir des données pour évaluer un modèle théorique préconçu ou des hypothèses a priori ». (Blanchet 2000 : 30)

Notre réflexion s’attellera dans un premier temps, à donner un aperçu sur la notion d’« insécurité linguistique » et présenter la méthodologie de la recherche et dans un second temps, à analyser notre corpus et à discuter les résultats.

1. À propos de l’insécurité linguistique

L’apparition du concept « insécurité linguistique » (noté IL) est associée aux travaux du sociolinguiste américain Labov (1966) sur la stratification sociale du phonème /r/ dans les magasins de New York. Labov a pu remarquer un écart entre ce que les locuteurs pensaient prononcer et leurs performances effectives. Il a traduit cet écart par un sentiment d’IL qui surgit surtout au sein de la petite bourgeoisie dont les membres cherchent à être en symbiose avec les comportements linguistiques des classes dominantes. La notion d’IL est donc basée sur le rapport entre un jugement de normativité (l’usage correct de la langue selon la perception du locuteur ou celle des autres) et une autoévaluation (l’usage personnel du locuteur). En d’autres termes, c’est la comparaison entre la forme linguistique que le locuteur utilise et le statut linguistique attribué à cette forme par lui-même ou par la communauté linguistique.

Dans le même sillage, Bourdieu (1982) pense que l’IL est une question de classe sociale. Bien qu’il n’utilise pas le terme d’insécurité linguistique, en évoquant les conséquences de la domination symbolique dans le domaine de la prononciation, le lexique et la syntaxe, Bourdieu explicite clairement le sens de ce phénomène langagier. D’après lui, les efforts de correction conscients ou inconscients des aspects linguistiques stigmatisés des classes dominées basculent certains locuteurs dans « le désarroi qui leur fait “perdre tous les moyens”, les rendant incapables de “trouver leurs mots”, comme s’ils étaient soudain dépossédés de leur propre langue ». (Bourdieu 1982 : 38)

Dans le milieu francophone, Gueunier et son équipe s’intéressent à l’IL dans des situations de diglossie. À partir d’une recherche qui avait pour objectif de réfléchir aux « réalisations » et « attitudes de divers Français de milieu urbain par rapport à l’usage oral de leur langue maternelle et à la norme linguistique dans ses diverses manifestations » (Gueunier et al 1978 : 07), ils sont arrivés à conclure que le sentiment de sécurité linguistique (noté SL) est plus amplifié dans les contextes où la forme valorisée est plus présente (Tours), que dans les régions d’usage de langues minorées (Lille, Limoges, Saint Denis de la Réunion).

C’est à Francard que revient le premier mérite d’une véritable théorisation de l’IL. Il définit ce phénomène comme étant :

La prise de conscience par les locuteurs, d’une distance entre leur idiolecte (ou leur sociolecte) et une langue qu’ils reconnaissent comme légitimes parce qu’elle est celle de la classe dominante, ou celle d’autres communautés où l’on parle un français « pur », non abâtardi par les interférences avec un autre idiome, ou encore celle de locuteurs fictifs détenteurs de la norme véhiculée par l’institution scolaire. (Francard 1993 : 13)

À travers son enquête en Ardenne (Belgique) en 1989, Francard démontre que l’institution scolaire accentue le sentiment d’IL. Pour lui, les sujets les plus « insécurisés » sont ceux qui sont plus scolarisés parce que :

[…] leur scolarité leur a permis de prendre la mesure du fossé qui sépare la légitimité des usages linguistiques attestés dans leur communauté – et qu’ils pratiquent sans se l’avouer - et celle du « bon usage » véhiculé par l’institution scolaire. Par l’école, ils sont devenus porte-parole d’un ostracisme qui les frappe eux-mêmes. (Francard 1993 : 151)

En somme, l’IL est un sentiment qui survient lorsque le locuteur se trouve dans l’incapacité conformer son dire à un modèle linguistique perçu comme normatif. Il s’agit d’une quête de légitimité qui s’apparente avec le genre, la localisation géographique et l’institution scolaire.

2. Cadrage méthodologique

Nous avons mené notre enquête auprès de Facebookeurs algériens de plusieurs régions, appartenant à des groupes francophones divers : des groupes d’étudiants de différents départements de français (Alger, Batna, Sétif et Skikda)  ; des groupes d’étudiants préparant le concours de Doctorat4 et des groupes d’échange de livres, de romans et des citations en langue française (« livres au format PDF », « proverbes et citations sur la vie »). Notons par ailleurs que les membres de ces groupes sont inscrits dans des filières et disciplines différentes : le français pour la majorité, l’architecture, la médecine, la psychologie et autres, que la plupart d’entre eux sont toujours en cours de formation et que leur niveau de formation va de la Licence, Master au Doctorat en passant par le diplôme des écoles supérieures, de médecine, d’ingéniorat, etc.

Afin de toucher le plus grand nombre possible de ces membres des différents groupes, nous avons procédé par questionnaire dont l’objectif général est de montrer dans quelle mesure l’insécurité linguistique pourrait constituer un obstacle pour les Algériens lors de la communication électronique sur Facebook. Ce questionnaire comprend trois volets :

  • le premier volet concerne les informations personnelles (le nom, le prénom, l’âge, le sexe, le niveau d’étude et le lieu d’habitat),

  • le deuxième volet porte sur les manifestations de l’insécurité linguistique

  • et le dernier volet est lié aux causes du phénomène.

Il se compose de 09 questions administrées en ligne. Elles sont tantôt fermées (à choix multiples), tantôt ouvertes. Nous avons construit notre questionnaire sur Google Forms et avons partagé son lien sur le réseau social Facebook dans les groupes cités plus haut. Durant les deux jours de publication de notre questionnaire (du 24 au 25 avril 2019), nous avons pu recueillir 200 réponses et nous avons soumis à analyse 198 d’entre elles5.

Les réponses collectées proviennent de 60 hommes et 138 femmes (soit la majorité). L’âge de la majorité des répondants varie de 19 à 29 ans. Quant à leur niveau d’étude : 43,43 % sont au premier cycle de l’enseignement supérieur algérien (licence), 37,37 % sont au deuxième cycle (master), 9,09 % sont en troisième cycle (doctorat) et 10,10 % sont inscrits en formation d’ingéniorat ou en médecine, etc. Il faut ajouter que nous avons demandé à nos enquêtés de mentionner la région où ils habitent et de préciser s’il s’agit de la ville ou bien de la périphérie. Nous avons recensé ainsi 50,50 % citadins et 49, 49 % contadins.

Hormis l’âge qui ne nous a pas fourni des résultats significatifs pour notre recherche, les variables sexe, niveau d’étude et région d’habitat, pris en considération dans la partie analytique de notre travail, ont pu nous aider à expliquer certains faits inhérents à notre problématique. L’étude des données collectées a été réalisée à l’aide du logiciel SPSS6 choisi pour sa simplicité et le large éventail des possibilités d’analyse de données qu’il offre ainsi que les statistiques descriptives qu’il permet d’obtenir. Nous avons opté pour une méthode mixte définie comme étant une approche combinatoire des données des deux points de vue quantitatif et qualitatif (Johnson et Onwuegbuzie 2004). Cette approche se prête parfaitement à notre recherche dans la mesure où l’insécurité linguistique est « un objet hétérogène » qui est d’un côté, un comportement linguistique quantitativement calculable et d’un autre, un sentiment psychologique qualitativement descriptible (Ledegen et Bretagnier 2003 : 38). L’association des deux méthodes nous a permis une meilleure compréhension de cet objet alors que l’utilisation d’une seule méthode ne nous aurait permis de saisir que certains aspects.

3. Résultats et discussion

L’analyse des réponses des internautes au questionnaire auquel nous les avons soumis a permis dans un premier temps de mettre en relief le phénomène d’insécurité linguistique et dans un deuxième temps de saisir les facteurs sous-tendant sa manifestation.

3.1. Les manifestations de l’insécurité linguistique

Le sentiment d’IL est polymorphe. Il existe plusieurs indices qui peuvent l’afficher. De manière concise, les plus fréquents sont : l’« hypercorrection », qui désigne selon Labov (1966) le vouloir d’écrire ou de parler parfaitement une forme qui n’est pas totalement maîtrisée, l’auto (d) évaluation de sa propre langue (2002), la dépréciation des façons de parler ressenties comme non légitimes ou régionales par rapport à la norme (Francard 1993) et le silence voire le mutisme. (Gadet 2003)

Pour notre cas d’étude, nous avons mis en exergue sous forme de trois points, les indices d’IL les plus représentatifs, repérés chez les Facebookeurs francophones algériens à partir de leurs réponses au questionnaire.

3.1.1. La dépréciation des compétences linguistiques

La question 01 (Avez-vous le sentiment de bien écrire en français ?) dévoile qu’en général nos enquêtés ont une perception négative de leur compétence à l’écrit. Notons que précisément 60,10 % déclarent être insatisfaits de leur niveau en langue française. À cet effet, nous pouvons dire que les attitudes linguistiques dépréciatives de nos enquêtés envers leurs compétences langagières sont des symptômes typiques de l’IL. Elles sont mobilisées par leur conscience normative qui dissocie le correct de l’incorrect (Berrendonner 1982). Le correct est « un modèle idéal » (Billiez et al 2002) qu’ils souhaitent pratiquer et qu’ils n’arrivent pas à atteindre. Cécile Canut (1995 : 41-42) considère que l’IL est une mauvaise autoévaluation voir un regard évaluatif instable sur sa langue.

Les réponses à la deuxième question (Selon vous, y a-t-il des Facebookeurs dans ce groupe ayant un meilleur usage de français que vous ?), viennent confirmer la situation d’IL décrite. En effet, 78,28 % de nos enquêtés affirment que ce sont les autres qui maîtrisent mieux le français à l’écrit qu’eux-mêmes dans les groupes francophones auxquels ils appartiennent. L’autre dans notre cas est un membre du même groupe et semble être détenteur de la norme, par rapport auquel nos enquêtés auto-dévaluent leurs connaissances. Dans le même item de cette question, nous avons invité les enquêtés qui ont répondu « oui », à préciser la région à laquelle, selon eux, appartiennent les Facebookeurs qui ont un meilleur usage du français qu’eux-mêmes dans ces groupes. La majorité des réponses (70 %) se concentrent sur la capitale (Alger) et le reste se répartissent sur d’autres métropoles algériennes : Oran 9 %, Tizi-Ouzou 6 %, Batna 4 %, Béjaia 4 %, Sétif 3 %, Constantine 2 % et Skikda 2 %.

Le français pratiqué à Alger est reconnu donc comme le plus proche du français légitime utilisé en France par rapport auquel, les Facebookeurs des autres régions d’Algérie dans les groupes francophones ont tendance à dévaloriser leurs pratiques. Cela nous renvoie aux travaux de Francard (1993) sur la communauté française en Belgique (Wallonie et Bruxelles) où il évoque « la sujétion linguistique » à la France comme aspect majeur d’IL. Nos enquêtés croient que c’est dans les villes et surtout à Alger où réside le bon francophone algérien et c’est cet imaginaire qui génère le sentiment d’IL chez eux surtout auprès des ruraux. Effectivement, en considérant la variable « lieu d’habitat » pour cette question : le taux maximal d’IL est repéré chez les locuteurs qui habitent loin de la ville avec 91,83 % alors que le taux maximal de SL est obtenu chez les citadins avec 81,39 %. En fait, l’idée selon laquelle les citadins maîtrisent mieux la langue française que les ruraux puise ses racines de l’époque coloniale où la majorité des Français se concentraient dans les grandes villes notamment à Alger. Même après leur départ en 1962, les Algériens qui les ont côtoyés durant la période coloniale maîtrisaient bien le français. C’est ainsi que les habitants des régions périphériques ont conservé jusqu’à nos jours, l’image qu’ils sont en deçà des pratiques langagières « prestigieuses » des citadins.

3.1.2 Le malaise dans la langue de l’autre

La troisième question (Quel sera votre sentiment si vous avez à rédiger un texte en français autour d’un sujet donné pour le publier dans ce groupe ou dans un autre groupe francophone ?) tente d’explorer le sentiment de nos enquêtés (à l’aise/mal à l’aise) quant à la publication d’une production écrite personnelle en français dans les groupes algériens francophones sur Facebook7 Les résultats obtenus révèlent que 63,63 % des enquêtés sont mal à l’aise à l’écrit. La gêne ressentie à l’idée de publier un texte en français montre d’une manière assez explicite le sentiment d’IL.

Mais, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce ne sont pas les moins scolarisés qui sont mal à l’aise, ce sont plutôt ceux qui cumulent le plus grand nombre d’années d’études qui éprouvent ce sentiment. Nous avons noté à cet effet que parmi ceux qui déclarent être mal à l’aise à l’écrit en français se trouvent 58,13 % licenciés, 66,21 % mastérants et 71, 05 % docteurs, ingénieurs et médecins. Ainsi, ceux qui détiennent les diplômes les plus élevés sont ceux qui témoignent le plus clairement d’IL. La dimension de scolarisation qui favorise l’émergence d’IL a été abordée par certains sociolinguistes et en particulier par Francard (1993). Pour lui, c’est l’école qui produit des locuteurs mal à l’aise en légitimant les normes linguistiques. Enseigner le français comme langue étrangère dans le monde francophone accentue le malaise linguistique comme il souligne : « en développant à la fois la perception des variétés linguistiques régionales et leur dépréciation au profit d’un modèle mythique et inaccessible le “bon” français, souvent assimilé au ». “français de Paris” » (Francard cité par Moreau 1997 : 171)

3.1.3 Le recours à des stratégies de compensation

Dans le but de dévoiler d’autres facettes de l’IL chez nos enquêtés, nous avons posé une autre question (Q04) qui porte sur les stratégies adoptées par les Facebookeurs algériens en cas de difficultés de communication en langue française. Au préalable, il convient de noter que nous avons spécifié aux enquêtés qu’ils avaient le choix entre répondre ou pas à cette question. De la sorte, nous pouvons considérer que toute réponse à la question est une affirmation d’une IL chez les répondants qui, conscients de leurs difficultés en langue, choisissent de répondre en expliquant la manière dont ils procèdent pour pallier leurs lacunes linguistiques. Nous avons enregistré un taux de 73,23 % de répondants, donc de personnes étant en IL. En considérant la variable sexe pour cette question, nous constatons que les femmes affichent le plus fort taux d’IL (87,69 %) et le moins fort taux de SL (12,31 %) par rapport aux hommes qui se révèlent plus en SL (60 %) et moins en IL (40 %).

Il est donc clair que les femmes font preuve d’une IL plus élevée comparant aux hommes. P. Trudgill (1974) atteste également cet état de fait chez les locuteurs féminins de Norwich (G.B) : une aspiration à s’approprier des formes légitimes qu’elles n’utilisent cependant pas de manière systématique. Labov affirme aussi, en comparant les pratiques masculines et féminines, que l’hypercorrection (l’un des symptômes typiques de l’IL) « est plus forte chez les femmes » (Labov 1966 : 210). Bourdieu explique alors que les femmes ont plus tendance à adopter la langue légitime à cause de leur statut social qui les rend plus dociles à l’égard des usages dominants.

Pour les solutions improvisées proposées par nos enquêtés, nous avons identifié plusieurs stratégies de compensation : l’usage d’une autre langue, l’usage de l’autocorrection automatique (la correction automatique, la traduction automatique et le dictionnaire en ligne), l’usage des messages iconiques et le recours au silence. Ces stratégies adoptées pour contourner le sentiment d’IL font sans doute partie de ses symptômes majeurs les plus représentatifs. La stratégie la plus souvent utilisée est l’alternance codique (60, 60 %) talonnée par l’autocorrection automatique (53,29 %), le message iconique (32,36 %) et le silence (7,38 %).

Pour remédier à leurs difficultés en langue française, 60,60 % des répondants font appel à l’usage d’une autre langue, c’est-à-dire à l’alternance codique définie par J. Gumperz, comme étant « la juxtaposition, à l’intérieur d’un même échange verbal, de passage où le discours appartient à deux systèmes ou sous-systèmes grammaticaux différents » (Gumperz 1989 : 9). Parmi les langues qui viennent se juxtaposer au français dans les écrits des internautes interrogés, « l’arabe algérien » occupe la première place. C’est la langue première d’un grand nombre d’Algériens et qui emprunte une bonne partie de son lexique au français comme le souligne Bellatrech : « Sans le français, l’arabe algérien se verrait amputer d’une bonne partie de ce qu’il représente » (Bellatrech 2017 : 405-413). Par ailleurs, d’autres se dirigent vers l’anglais. Il s’agit d’une autre langue étrangère en Algérie classée officiellement après le français, en pleine expansion surtout avec le dernier décret du ministère de l’Enseignement supérieur qui annonce sa généralisation à l’université et dans la recherche scientifique au détriment de la langue française8.

Pour la deuxième stratégie énoncée par ceux qui ont répondu à cette question, un peu plus que la moitié (53,29 %) déclare utiliser en cas de difficulté de communication en français, des outils d’aide à la révision en l’occurrence la correction automatique, la traduction automatique et le dictionnaire en ligne. Notons que ces méthodes ne sont pas tout à fait fiables et peuvent facilement induire en erreur. Cet état de fait porte à croire que ces méthodes amplifient chez les internautes le sentiment d’IL.

Bien qu’ils soient fréquemment cités par nos enquêtés, ces outils peuvent créer en eux un sentiment d’incertitude à l’égard de leurs capacités langagières, notamment en langue étrangère, et ce pour diverses raisons.

Primo, la correction automatique qui a pour but de détecter les fautes et suggérer des corrections possibles peut proposer des formes orthographiques ou grammaticales complètement erronées. Sur Facebook, elle fonctionne avec la mémorisation des formes linguistiques souvent utilisées. Si l’utilisateur a l’habitude d’écrire incorrectement un mot, le logiciel va le conserver avec ses fautes et le proposer chaque fois comme une correction possible.

Secundo, la traduction automatique peut carrément changer le sens dans la langue initiale. Google traduction, mentionné dans les réponses de nos enquêtés, est un logiciel gratuit qui a l’aptitude de traduire les mots ou les textes en un clic dans toutes les langues du monde, mais sans jamais garantir le résultat. Dans certains cas, il modifie la signification et dans d’autres, il propose une traduction totalement incompréhensible.

Tercio, le dictionnaire en ligne auquel nos enquêtés ont recours est similaire à tous autres types de dictionnaires qui contiennent des mots polysémiques. Si le contexte dans lequel se trouve le mot est vague, le dictionnaire est capable de les orienter vers des significations incompatibles avec celles qui conviendraient.

Quant à la troisième stratégie d’aide à la rédaction, les répondants évoquent l’utilisation des formes iconiques : à la place des phrases recherchées et bien élaborées, 32,36 % parmi eux annoncent qu’ils préfèrent communiquer par messages iconiques afin d’être sûrs de ne pas commettre d’erreurs linguistiques. Cette stratégie a une double fonction : d’un côté, compenser les carences linguistiques pour véhiculer un message et d’un autre rester dans la zone de confort, ce qui pourrait conforter ces utilisateurs et apaiser leur sentiment d’IL. En fait, les messages iconiques (émoticônes, emojis, autocollants, gifs, images et vidéos…) figurent aujourd’hui parmi les outils d’expression les plus bouleversants des nouvelles technologies de la communication en ligne. Ils sont souvent présentés comme un des traits caractéristiques saillants du discours médié par ordinateur (les courriers électroniques, les réseaux sociaux ou les messageries instantanées). Facebook comme d’autres réseaux sociaux, est actuellement doté de ce système sémiotique particulier dont l’utilisation excessive pourrait expliquer l’apparition chez les fervents de ce nouveau code de communication, d’une forme de réserve à l’égard du langage normé, voire d’une IL.

Comme quatrième stratégie de compensation, nous avons noté que quelques répondants (7, 38 %) optent pour le silence afin de combler leur manque linguistique lors d’une communication en français. Leur nombre réduit peut s’expliquer à notre avis par le choix que les plateformes de discussion offrent aux utilisateurs : outre les outils d’aide à la révision, les symboles iconiques, etc., ils peuvent interrompre, ignorer ou arrêter une conversation sans avoir à recourir au silence. Cela dit, en ligne, utiliser un emoji en cœur ou en sourire comme réponse à une question dans une conversation peut refléter la volonté de se taire. En effet, les petits symboles que le Facebookeur insère dans un commentaire ou sur le Tchat pourraient bien avoir un sens connoté construit à partir du contexte, des expériences antérieures et des règles discursives du langage (Bliss 2016). En d’autres termes, un petit sourire ne renvoie pas toujours à une satisfaction, mais parfois annonce l’intention de s’abstenir. De plus, il existe sur la toile des symboles qui expriment exclusivement la décision de garder le silence. Il suffit d’ajouter des fois un petit bonhomme avec un x sur la bouche pour marquer son retrait.

À la lumière des résultats précédents, nous pouvons dire que les jugements auto-dépréciatifs qui se manifestent par le sentiment d’infériorité, de malaise par rapport à la pratique du français écrit considéré non conforme à la norme, les stratégies de compensation au manque linguistique telles que l’alternance codique, l’autocorrection automatique, le message iconique ainsi que le silence sont les indices les plus récurrents d’IL repérés chez nos enquêtés. Ce sentiment en fait, plus fréquent chez les femmes que les hommes, augmente dans la mesure où les sujets montent dans l’échelle éducative et se concentre à la périphérie plus qu’à la ville.

3.2. Aux origines de l’insécurité linguistique

Il est certes qu’une fois manifeste, l’IL est difficile d’être éliminée totalement chez l’utilisateur d’une langue étrangère quel que soit dans la communication personnelle directe ou indirecte (comme dans notre cas via Facebook). Toutefois, il est possible de l’atténuer, et ce, en reconnaissant les causes qui la mobilisent pour pouvoir bien les contrôler.

Dans la deuxième partie de la troisième question, nous avons demandé à nos enquêtés de justifier leur choix (Dites pourquoi vous avez ce sentiment. )9 En réponse à cette question, les internautes ont donné quatre raisons (que nous présenterons ci-après) expliquant l’origine de leur IL.

3.2.1. La peur d’être critiqué

Nos enquêtés rattachent leur malaise avec la langue française à la peur de faire des erreurs et d’être critiqués. Il est évident dans leurs dires qu’il y a une corrélation entre l’autocorrection, le regard ou la réaction d’autrui et le sentiment d’IL :

F54 : J’ai peur de faire des erreurs et j’aime que pas les autres me corrigent
F157 : Je peux faire des fautes et tout le monde va corriger
F41 : Je fais des fautes on va critiquer

Ainsi, à trop vouloir être un francophone parfait, le Facebookeur algérien interrogé a une faible estime de ses propres compétences linguistiques. La peur est le premier motif de cette sous-estimation qui s’aggrave encore plus lorsque le locuteur/scripteur est confronté à une attitude dépréciative à l’égard de son expression linguistique. Dans un pays tel que l’Algérie où le français est considéré comme une « langue de prestige» (Ali-Bencherif et Mahieddine, 2016), les « fautes de français » passent rarement inaperçues. Sur Facebook et surtout dans les groupes francophones, un seul élément linguistique inapproprié suffit pour déclencher un torrent de commentaires négatifs. Il faut dire alors que la méfiance des critiques sur la plateforme engendre un malaise linguistique chez les utilisateurs.

3.2.2. Le français, une langue difficile

Selon nos enquêtés la langue française est difficile. Prenons à titre d’exemple, les assertions formulées par les internautes suivants :

F77 : C’est difficile d’écrire en français
F06 : Le français est difficile

Cette difficulté pourrait s’expliquer par le fait que les langues parlées en Algérie appartiennent, à la base, à des systèmes linguistiques complètement différents : l’arabe algérien, le Tamazight et le français appartiennent respectivement à la famille de langues chamito-sémitiques, afro-asiatiques et indo-européennes. Cette différence intrinsèque aux langues peut créer une difficulté lors du passage des règles de leurs langues premières à celles de la langue française. Par ailleurs, nous avons noté dans notre corpus que quelques répondants préfèrent utiliser l’anglais plutôt que le français sur Facebook. Pour eux, le système qui structure le français est plus complexe à gérer par rapport à celui de l’anglais. Dans ce sens, reprenons les propos de deux internautes qui déclarent :

F26 : La langue est difficile je préfère écrire en anglais
F14 : Écrire en anglais c’est mieux

De plus, la faible connaissance de l’ensemble des règles à suivre pour écrire correctement en français place directement ses utilisateurs dans une situation d’inconfort linguistique. C’est le cas de :

F128 : J’ai beaucoup de difficulté au niveau de la grammaire
F61 : Parce que les points de langue (grammaire et conjugaison) sont compliqués par rapport aux autres langues.
F117 : Je ne maîtrise pas bien la grammaire.

Cette perception de difficulté principalement d’ordre grammatical pourrait provenir du fait que les langues reposent sur des mécanismes minutieux et très réguliers, constituant un savoir collectif inconscient (Cusimano 2013). Sous cet angle, Gueunier déclare que les fautes de grammaire sont « traditionnellement jugées “scandaleuses » (un point de moins pour les fautes de vocabulaire, deux pour celles de grammaire) et que les utilisateurs d’une langue « perçoivent la grammaire comme une sorte de champ de mines que l’on est malheureusement obligé de traverser pour écrire ». (Gueunier 1994 : 116)

Cela dit, certains Facebookeurs interrogés déclarent être fortement gênés lorsqu’ils ne trouvent pas les mots et les expressions adéquates à leurs pensées. C’est le cas de :

F112 : Je trouve pas les mots quand j’écris
F145 : Le vocabulaire est difficile

D’autres, par ailleurs, annoncent que leur malaise en écrivant en français est lié à des difficultés d’orthographe, en l’occurrence chez :

F50 : Je suis faible en orthographe
F131 : J’arrive pas à écrire juste les mots

En fait, écrire correctement un mot en français n’est jamais une tâche aisée vu la différence entre la prononciation des mots et leur orthographe. En effet, Paul Valéry explique la difficulté d’écrire correctement en français par

« l’absurdité de notre orthographe qui est, en vérité, une des fabrications les plus cocasses du monde bien connue. Elle est un recueil impérieux ou impératif d’erreurs d’étymologie artificiellement fixées par des décisions inexplicables. » (Valery cité par Goosse 1991 :72)

Tel est le cas du/o/qui peut s’écrire « o, au, eau » : il n’y a pas une similitude entre le phonème et ses différents graphèmes. En somme, que ce soit en grammaire, vocabulaire ou en orthographe, le français porte d’après les déclarations de nos enquêtés, l’étiquette d’une langue difficile.

Toutefois, la question qui s’impose ici est : le français est-il vraiment compliqué comme ils en ont l’impression ? D’un point de vue sociolinguistique, il n’existe aucune raison pour dire qu’une langue est plus difficile qu’une autre. En effet, les théories d’acquisition attestent que si un enfant de deux ou trois ans peut apprendre aisément la langue de ses parents qu’elle soit anglaise, française ou chinoise, c’est que nulle langue dans le monde n’est compliquée. Grâce au déploiement de processus universels innés en interaction avec son environnement, l’enfant apprend à parler n’importe quelle langue (Bresson dans Luc 1992 : 25). De là, nous pouvons dire que toute langue est accessible. Par conséquent, la conviction d’un locuteur adulte qu’une langue est difficile ne provient guère de caractères inhérents à la langue elle-même, mais plutôt de ses propres représentations. En fait, si l’enfant est capable d’assimiler plusieurs langues dans son jeune âge, c’est parce qu’il ne possède encore aucune représentation négative sur ces langues pouvant le freiner dans son apprentissage, contrairement à l’adulte dont l’esprit est chargé d’images construites à partir de ses expériences individuelles ou sociales. De la sorte, l’imaginaire collectif algérien donnant au français l’image d’« une langue trop difficile, avec une grammaire trop compliquée ; c’est la langue du colonisateur, de l’ennemi » (Outaleb-Pellé 2014 : 1728) contribue à créer chez le locuteur algérien des représentations linguistiques négatives sous-tendant sa conviction que la langue française est difficile et l’empêchant, en conséquence d’exercer aisément cette langue. D’autant plus que l’image de la langue prestigieuse qui n’est pas à la portée de tout le monde dont jouit la langue française ne date pas d’aujourd’hui. Elle remonte à l’époque de la création de « L’Académie française » qui définit, selon l’un de ses membres : Vaugelas (1647), le « bon usage » comme étant : « la façon de parler de la plus saine partie de la Cour, conformément à la façon d’écrire de la plus saine partie des Auteurs du temps ». À cet effet, l’image socialement partagée de la langue française en tant qu’une « langue de prestige » peut, à notre sens, justifier le sentiment de difficulté à s’exprimer dans cette langue, voire d’IL, en l’occurrence chez les Facebookeurs algériens.

3.2.3. L’environnement sociolinguistique algérien

Ce qui pourrait également expliquer la présence de l’IL chez les Facebookeurs algériens, c’est l’attachement explicite qu’ils témoignent à la langue arabe. Nous avons pu voir dans les propos de ceux qui sont mal à l’aise à l’idée de publier en français dans les groupes francophones, une sorte de revendication identitaire :

F17 : Ma langue est l’arabe
F39 : C’est pas ma langue je suis fier de ma langue arabe

Cependant, chez les répondants qui sont à l’aise, nous retrouvons dans leur propos une forme de mise en avant de la place qu’occupe la langue française dans le paysage sociolinguistique algérien :

F162 : C’est une langue que j’utilise chaque jour, très utilisée dans notre pays dans tous les domaines
F05 : j’ai l’habitude d’écrire en français au travail
F24 : Parce que je suis algérien
F84 : je me suis habitué à écrire le français pour mes études.

Pour expliquer cet état de fait paradoxal que l’on peut retrouver au sein de la communauté linguistique algérienne, entre d’un côté une identité linguistique fortement attachée à l’arabe standard et d’un autre côté, la réalité des langues en présence dans le paysage sociolinguistique, notamment la prédominance du français dans les échanges quotidiens, Dourari (2003) atteste que l’Algérie connaît véritablement un malaise linguistique dû globalement à la classification des variétés linguistiques en présence. L’hiatus entre le projet linguistique de la postindépendance et les usages des langues en présence est alors la source du sentiment d’IL chez le locuteur algérien.

3.2.4. Les aspects socioculturels

En prenant appui sur les déclarations des internautes interrogés, nous voyons clairement, en nous inspirant de la typologie établie par Taleb-Ibrahimi, K sur les différents groupes socioculturels en présence en Algérie, que les répondants qui ont vécu dans un environnement francophone, ayant un capital culturel élevé et qui dégagent des attitudes positives envers la langue française déclarent qu’ils sont très à l’aise avec cette langue. Cependant, ceux qui n’ont côtoyé le français qu’à l’école, ayant un niveau culturel modeste et qui n’aiment pas la langue, disent être vraiment mal à l’aise en la pratiquant. Cela nous permet de dire que l’appartenance socioculturelle à une influence certaine sur l’apparition ou non du sentiment d’insécurité linguistique chez le Facebookeur algérien.

Citons à titre d’exemple, les internautes qui sont à l’aise en s’exprimant en français :

F31 : j’ai appris à lire et écrire chez moi dès mon jeune âge
F81 : mon père me l’a apprise depuis l’enfance
Et ceux qui ne le sont pas :
F45 : J’ai pas l’habitude d’écrire en français dans mon entourage
F175 : Je ne peux pas écrire bien j’ai pas appris le français tôt jusqu’à l’école

En somme, nos informateurs expliquent leur bien-être/mal-être en écrivant en français par des raisons qui s’apparentent à la famille et à l’entourage. De la sorte, nous confirmons la relation étroite entre la sécurité/insécurité linguistique et le milieu socioculturel de nos internautes interrogés.

Conclusion

Outre la dévalorisation de ses propres compétences linguistiques, le manque de confiance en soi, l’alternance des langues et le recours au silence, l’IL se manifeste chez les usagers linguistiques de notre corpus à travers de nouveaux indices, tels que l’usage de l’autocorrection automatique et de l’insertion de messages iconiques. Ces formes de manifestation de l’IL chez les Facebookeurs algériens interpellent dans la mesure où elles peuvent, dans le cas d’utilisation exagérée de l’une des méthodes de compensation, nuire aux opérations de transmission et de réception du message et entraîner la démission totale du locuteur de toute interaction inter/intra groupale. De plus, en mettant l’accent sur le rapport saillant entre l’IL chez nos enquêtés et les nombreux facteurs sous-jacents, en l’occurrence les aspects psychologiques du sujet algérien (la peur d’être critiqué), psychosocial (les représentations linguistiques, le niveau de formation, le sexe, la famille, etc.), socioculturel (sa culture et la culture de l’Autre) et sociolinguistique (les langues en présence dans l’environnement dans lequel évolue le sujet), nous pouvons également dire que le Facebookeur algérien est loin de gérer sereinement son rapport aux langues. Pour toutes ces raisons, la question de la communication numérique se pose aujourd’hui avec acuité dans le contexte algérien. À l’ère du numérique, nous nous devons alors repenser nos rapports à autrui et aux langues et de poser les jalons d’une nouvelle éducation au numérique qui tienne surtout compte des spécificités du sujet social algérien.

2 Le français est largement utilisé sur les réseaux sociaux en Algérie. Voir entre autres (Benslimane 2016), (Melouah et Maiche 2017), (Sebiane 2017)

3 Au sens de l'imaginaire linguistique subjectif qui renvoie, selon Houdebine 1977, aux normes subjectives d'évaluation dont témoigne le sujet à

4 «Doctorat Sciences du langage / Didactique / littérature 2019», «Doctorat Littérature, Sciences du langage», «Didactique du FLE /FOS»

5 Nous avons écarté deux réponses incomplètes.

6 Signifie en anglais «Statistical Package for the Social Sciences». C'est un logiciel permettant de réaliser la totalité des analyses statistiques en

7 Il convient de noter que cette question débouchera sur une suite ayant pour objectif de découvrir l'origine de ce malaise que nous exposerons (infra

8 Annoncée par le Minsitre de l'Enseignement Supérieur, Monsieur Benbouzid Tayeb, en 2019

9 Les répondants sont appelés à expliquer pourquoi ils se sentent à l'aise/ mal à l'aise à l'idée de publier un texte en français sur les groupes

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2 Le français est largement utilisé sur les réseaux sociaux en Algérie. Voir entre autres (Benslimane 2016), (Melouah et Maiche 2017), (Sebiane 2017), etc.

3 Au sens de l'imaginaire linguistique subjectif qui renvoie, selon Houdebine 1977, aux normes subjectives d'évaluation dont témoigne le sujet à propos de son expression écrite.

4 «Doctorat Sciences du langage / Didactique / littérature 2019», «Doctorat Littérature, Sciences du langage», «Didactique du FLE /FOS»

5 Nous avons écarté deux réponses incomplètes.

6 Signifie en anglais «Statistical Package for the Social Sciences». C'est un logiciel permettant de réaliser la totalité des analyses statistiques en sciences sociales.

7 Il convient de noter que cette question débouchera sur une suite ayant pour objectif de découvrir l'origine de ce malaise que nous exposerons (infra page 13).

8 Annoncée par le Minsitre de l'Enseignement Supérieur, Monsieur Benbouzid Tayeb, en 2019

9 Les répondants sont appelés à expliquer pourquoi ils se sentent à l'aise/ mal à l'aise à l'idée de publier un texte en français sur les groupes francophones sur Facebook.

Kerboua Ferial

L.D.L.T1Laboratoire de Didactique de la Langue et des Textes - Lounici Ali-Université de Blida 2

Bourkaib Saci Naoual

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