La dimension pragmatique dans l’interprétation de l’écho ironique

البعد البراغماتيكي في تفسير الصدى الساخر

The pragmatic dimension in the interpretation of the ironic echo

Soraya Hadjarab

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بحث إلكتروني

Soraya Hadjarab, « La dimension pragmatique dans l’interprétation de l’écho ironique », Aleph [على الإنترنت], Vol 9 (4) | 2022, نشر في الإنترنت 15 octobre 2022, تاريخ الاطلاع 21 décembre 2024. URL : https://aleph.edinum.org/6847

Il sera question dans cet article du phénomène de l’ironie que nous avons essayé d’approcher en se référant à la théorie de Sperber et Wilson (1978) d’après lesquels l’ironie est une reprise en écho (implicite) d’un énoncé que l’énonciateur désapprouve. L’objectif de notre étude est de montrer l’importance de la dimension pragmatique dans l’interprétation du phénomène qui renferme une grande part d’implicite. Pour étayer cette théorie, nous avons analysé un corpus constitué d’énoncés tirés du site internet du journal satirique algérien El Manchar afin de relever les échos qui y figurent.

سنناقش في هذه المقالة ظاهرة السخرية في الخطاب والتي حاولنا دراستها من خلال الإشارة إلى نظرية سبيربر وولسون (1978) التي تنص على أن السخرية هي عبارة عن صدى (ضمني) لفكرة يرفضها المتحدث. الهدف من دراستنا هو إظهار أهمية البعد البراغماتي في تفسير الظاهرة التي تحتوي على جزء كبير من الضمني. ولدعم هذه النظرية، قمنا بتحليل بعض عناوين مقالات مأخوذة من موقع صحيفة المنشار الجزائرية الساخرة و ذلك من أجل التقاط الأصداء الموجودة.

This article will discuss the phenomenon of irony that we have tried to approach by referring to the theory of Sperber and Wilson (1978) according to which irony is a resumption in echo (implicit) of a statement that the speaker disapproves of. The objective of our study is to show the importance of the pragmatic dimension in the interpretation of the phenomenon which contains a large part of the implicit. To support this theory, we analyzed a corpus made up of statements taken from the website of the Algerian satirical newspaper El Manchar in order to pick up the echoes that appear there.

Introduction

Les questions de styles, dont l’ironie à laquelle nous nous intéressons dans cet article, ont durant très longtemps fait l’objet des analyses rhétoriques. Avec l’avènement de l’approche pragmatique, ces questions ont été reprises sous un nouvel angle ouvrant le champ à de nouvelles interrogations qui se sont soldées par des théories qui ont permis de dépasser certains problèmes liés à l’analyse rhétorique classique.

Charaudeau et Maingueneau (2002), dans le dictionnaire d’analyse du discours, mentionnent quatre théories qui traitent de l’ironie : l’ironie comme trope selon la tradition rhétorique, l’ironie comme mention (Sperber et Wilson, 1978), l’ironie comme polyphonie (Ducrot, 1984) et l’ironie comme paradoxe (Berrendonner, 1981).

Dans une perspective d’une analyse pragmatique, nous mettons l’accent dans notre recherche sur la théorie de Sperber et Wilson qui s’inscrit dans le modèle inférentiel de la communication qui conçoit la pensée différemment de la communication verbale. Selon eux, la pensée est bien plus riche que les énoncés effectifs qui restent incomplets et que le co-énonciateur dans un processus d’interprétation doit recomposer et compléter :

En rédigeant ce livre, nous n’avons pas littéralement mis nos pensées sur du papier. Ce que nous avons mis sur le papier, ce sont de petites marques noires dont vous avez en ce moment une copie sous les yeux. Quant à nos pensées, elles sont restées là où elles ont toujours été : dans nos cerveaux. (Sperber et Wilson, 1989 : 11)

Une conception bien loin de la tradition rhétorique qui envisage la communication comme étant littérale, autrement dit tout locuteur exprime explicitement dans ses énoncés ce qu’il veut dire et les cas de non littéralité, comme l’ironie, sont rangés dans la catégorie des exceptions. L’analyse rhétorique classique définit l’ironie comme un trope dont le sens littéral est remplacé par un sens figuré qui va totalement à son opposé. Cette analyse présente plusieurs problèmes entre autres, elle ne fournit aucune réponse au pourquoi de l’existence du phénomène.

Suivant l’analyse pragmatique développée par Sperber et Wilson, la limite de l’analyse classique de l’ironie revient à l’ignorance d’un élément intervenant dans le processus d’ironisation : il s’agit d’un écho ou d’une allusion à une pensée ou à un énoncé que le locuteur attribue tacitement à une tierce personne (la cible) qu’il disqualifie en s’en moquant.

 On peut concevoir plutôt que toutes les ironies sont interprétées comme des mentions ayant un caractère d’écho : écho plus ou moins lointain, de pensée ou de propos, réels ou imaginaires, attribués ou non à des individus définis. Lorsque l’écho n’est pas manifeste, il est néanmoins évoqué. (Sperber & Wilson, 1978 : 408)

1. Le discours non littéral et ses limites

1.1. Le discours non littéral

Il relève du discours non littéral tout énoncé présentant une part d’implicite. Il apparait principalement sous quatre formes : les actes de langage indirects, le discours approximatif, le discours de fiction et le discours figuratif ou figures de rhétorique dont l’ironie qui constitue l’objet de notre étude. Ce qui est patent dans la communication verbale est que les locuteurs communiquent souvent leurs intentions de manière indirecte ou implicite. Selon Sperber et Wilson (1989) « le discours non littéral est extrêmement fréquent, voir préféré par les locuteurs et que c’est plutôt le discours littéral l’usage marqué » (Bracops, 2010 : 130).

Les raisons d’un tel phénomène reviennent à la pertinence de la communication et l’économie des efforts cognitifs. L’intérêt que portent les interlocuteurs aux propos respectifs des uns et des autres est motivé par la pertinence présupposée des informations que véhicule le discours. Or la communication non littérale apporte souvent plus d’informations que la communication littérale comme le montre l’exemple suivant :

X : Veux-tu boire quelque chose ?
Y : Non merci.
Y : J’ai déjà pris un jus d’orange

Si on compare les deux réponses de Y à la question de X, on constate que la première réponse est une réponse littérale, un acte direct de refus par contre la seconde réponse est non littérale et nécessite l’activation d’un processus inférentiel pour déterminer les implicitations autrement dit l’interpréter comme un refus. De plus, le contenu informatif dans la seconde est plus riche, car il nous informe à la fois du refus et la raison du refus.

Cet exemple montre par ailleurs que l’interprétation des énoncés passe donc par deux étapes. Une étape linguistique, codique, au cours de laquelle X comprend le sens des mots utilisés par Y et une étape pragmatique, inférentielle, au cours de laquelle X comprend le vouloir dire de Y (le refus).

Pour expliquer ce caractère implicite de la communication verbale, Sperber et Wilson (1989) avaient développé un modèle de communication, le modèle de l’inférence, pour remédier aux insuffisances du modèle codique qui ne décrit que la communication explicite.

Ce modèle explique comment les phrases, dotées d’une signification donnée par le code linguistique, sont augmentées d’un sens, produit dans un contexte particulier. […] Le modèle du code associe des significations aux phrases. Mise en contexte, une phrase devient un énoncé, qui donne lieu à des inférences, et correspond au vouloir dire du locuteur. (Zufferey, Z et Moeschler, J, 2010 : 27)

Ainsi, bien que l’on puisse admettre que le langage est conçu comme un code associant des représentations phonétiques de phrases à des représentations sémantiques de ces phrases, nombreux sont les travaux relevant de la psycholinguistique, de la pragmatique et de la philosophie du langage qui ont montré l’énorme fossé entre les représentations sémantiques de la phrase et les pensées réellement communiquées par les énoncés. Ce fossé n’est pas rattrapé par un surplus d’effort de codage, mais par l’inférence. (Ludwig, 1997 : 189)

Selon Zufferey et Moeschler (2010), le modèle de l’inférence permet la validation empirique de la pertinence comme raison principale au caractère non littéral de la communication. En effet, afin de produire des effets cognitifs précis (le sens de l’énoncé), il est tout à fait pertinent de faire appel à des hypothèses contextuelles par le biais d’une phrase ayant une signification précise. Ce processus produit des énoncés qui gagnent non seulement en pertinence, mais aussi en information.

Cet enrichissement pragmatique en informations détermine quatre niveaux de sens (Zufferey et Moeschler, 2010) : la proposition communiquée ou forme propositionnelle qui consiste dans l’explicitation basique de l’énoncé que permet la désambigüisation par l’attribution des référents ; la force illocutionnaire de l’énoncé ou l’acte de langage réalisé et qui suppose une certaine attitude propositionnelle du locuteur (par exemple, l’affirmation suppose la croyance et la promesse suppose l’intention de réaliser l’action) et enfin les implicitations de l’énoncé que l’on calcule par le truchement d’un processus inférentiel. Ces implicitations sont de deux types : les conclusions implicitées et les prémisses implicitées. La conclusion implicitée caractérise l’implicitation dérivée sur la base d’une hypothèse contextuelle, alors que la prémisse implicitée est construite sur la base des indications linguistiques fournies par l’énoncé. « Le processus inférentiel prend pour entrée un ensemble de prémisses, et produit en sortie des conclusions qui suivent logiquement des prémisses, ou au moins qui sont justifiées par elles ». (Ludwig, 1997 : 190)

Dans l’exemple suivant :

X : Aimerais-tu manger des tagliatelles ?
Y : je n’aime pas les pâtes.

On peut tirer de l’énoncé de Y des implicitations : une conclusion implicitée (Y n’aimerait pas manger des tagliatelles) et une prémisse implicitée (les tagliatelles sont des pâtes). Le processus d’interprétation ne se limite pas bien évidemment aux implicitations, mais intègre aussi les explicitations :

  • La forme propositionnelle : Y n’aime pas les pâtes.

  • L’acte de langage : refus.

  • L’attitude propositionnelle : Y ne désire pas manger des pâtes.

L’interprétation de cet énoncé peut s’enrichir davantage sur la base d’autres prémisses implicitées comme « les macaronis sont des pâtes ». De nouvelles conclusions implicitées peuvent être ainsi tirées « Y n’aimerait pas manger des macaronis ».

Avec sa réponse indirecte, Y à produit donc plus d’effet contextuel. Son choix pour un mode de communication non littérale s’explique par la recherche de pertinence.

Il en est de même pour l’emploi des figures de rhétorique comme l’ironie exprimant la détermination de l’énonciateur à atteindre une pertinence maximale.

Le recours à l’usage des figures correspond donc une fois encore à la volonté du locuteur de produire l’énoncé le plus pertinent possible. Le fonctionnement de l’énoncé figuratif est analogue à celui de l’acte de langage indirect et de l’énoncé approximatif : le locuteur choisit de produire un énoncé non littéral qui exprime une proposition voisine de celle représentant la pensée à communiquer, mais qui présente suffisamment d’implications contextuelles communes avec cette pensée pour ne pas poser de problème d’interprétation à l’interlocuteur. (Bracops, 2010 : 137)

1.2. Frontière entre le discours littéral et non littéral 

Dans la tradition rhétorique, la ligne de distinction entre les énoncés littéraux et non littéraux est bien marquée. Considérés comme des cas exceptionnels, les énoncés non littéraux communiqueraient deux significations : une littérale et une autre non littérale. De ce point de vue, le traitement de ces énoncés passerait par deux étapes, tout d’abord par l’accès au sens littéral qui sera rejeté, car il ne correspond pas aux données contextuelles pour être ensuite remplacé par la signification intentionnellement communiquée par l’énonciateur. Un traitement, donc, plus couteux sur le plan cognitif dans le sens où il nécessite plus d’efforts.

Sur ce point, la vision de l’analyse pragmatique de Sperber et Wilson est divergente. Elle estime qu’il n’y a pas de frontière stricte entre littéralité et non-littéralité et qu’« il s’agit plutôt d’un continuum allant de la littéralité totale (communauté de toutes les implications contextuelles1 de la pensée et de l’énoncé) à la non-littéralité la plus élevée (communauté d’une implication contextuelle unique). » (Bracops, 2010 : 132)

Dans la théorie de la pertinence, les énoncés ne sont que des représentations imparfaites de nos pensées qu’ils permettent de communiquer. En d’autres termes, littéralité et non-littéralité ne se définissent pas dans l’absolu, mais par rapport à la pensée que le locuteur veut communiquer et en fonction du degré de ressemblance entre la proposition exprimée par l’énoncé et la pensée du locuteur. De ce point de vue, la représentation littérale de la pensée n’est qu’un cas particulier d’extrême ressemblance où pensée et énoncé ne font qu’un. Ainsi, le champ de la non-littéralité serait illimité et l’ironie ou la métaphore par exemple ne constituent que des cas parmi d’autres dans ce qui constitue la norme : la non-littéralité.

Annuler toute distinction entre les énoncés littéraux et non littéraux en les situant sur un continuum c’est leur reconnaitre un processus d’interprétation identique au cours duquel les locuteurs combinent les informations linguistiques aux informations contextuelles pour arriver à inférer une signification pertinente. Un principe donc unique qui répond parfaitement aux exigences de l’économie cognitive.

Cette approche rend compte que la littéralité ou la non-littéralité n’est définissable qu’en contexte. Autrement dit, cette propriété n’est pas linguistique et n’appartient pas à la phrase, mais pragmatique et caractérise l’énoncé. C’est pourquoi, et selon des contextes différents, la même phrase recevrait une interprétation littérale ou non littérale et parfois même des interprétations non littérales différentes.

Exemple : je vous remercie pour votre amabilité.

Cet énoncé est littéral dans le cas où l’interlocuteur a réellement été aimable. En revanche, si l’interlocuteur avait fait preuve de grossièreté l’énoncé est non littéral et il est à interpréter comme discours ironique.

2. Pertinence et ironie en pragmatique

Dans ce qui suit, nous limiterons l’aperçu théorique aux seules perspectives développées par Dan Sperber et Deirdre Wison.

2.1. La théorie de la pertinence

La théorie de la pertinence de Dan Sperber, anthropologue cognitiviste français, et de Deirdre Wilson, linguiste anglais, a vu le jour dans les années 80. Elle est à la fois une théorie de la cognition et une théorie pragmatique de l’interprétation des énoncés en contexte. Elle explique la communication et la cognition selon le principe de pertinence qui se définit en matière d’effets et d’effort cognitifs. Les effets cognitifs ou contextuels consistent dans le résultat du processus d’interprétation alors que l’effort cognitif désigne l’effort de traitement de l’acte de communication.

Cette théorie d’approche cognitive suppose que les êtres humains cherchent à être pertinents, un trait spécifique à l’esprit humain qui conduit le locuteur à produire l’énoncé le plus pertinent en fonctions des hypothèses disponibles (principe cognitif). Cette théorie est différente de la théorie Gricéenne (Grice 1979, 1989) d’approche rationaliste qui suppose que les locuteurs échangent selon des règles et des normes universelles (les maximes conversationnelles) qui s’imposent à tout locuteur rationnel. Ces règles fonctionnent selon un principe général, le principe de coopération.2

Outre le principe cognitif, la pertinence de la communication fait appel à un second principe : le principe communicatif selon lequel l’énoncé présuppose sa propre pertinence optimale.

Pourquoi le destinataire est-il autorisé à supposer que l’énoncé du locuteur (son acte de communication ostensive) est optimalement pertinent ? Parce que sans cette présomption de pertinence optimale, il est impossible d’expliquer pourquoi le destinataire lui prête attention. Rien ne justifie en effet qu’un effort de traitement de l’acte de communication soit engagé sans qu’il y ait en retour une présomption (au pire) ou une garantie (au mieux) de pertinence. Si le destinataire s’engage dans un processus d’interprétation, couteaux du point de vue cognitif, c’est qu’il peut s’attendre à ce que les efforts de traitement qu’implique l’interprétation de l’énoncé soient compensés par des effets. Son engagement dans le processus de compréhension est donc lié à un second principe, cognitif de pertinence : La cognition humaine tend à la maximisation de la pertinence. (Moeschler et Auchelin, 2009 : 181)

On peut dire qu’un énoncé est pertinent dès qu’il produit un effet cognitif dans un contexte donné, toutefois son degré de pertinence dépend du nombre des effets cognitifs produits et des efforts de traitement. Autrement dit, plus un énoncé produit d’effets contextuels, plus il est pertinent et plus il demande d’efforts cognitifs moins il est pertinent, dans ce contexte. La communication pertinente est celle qui produit le maximum d’effets contextuels à moindre coût cognitif. C’est la raison pour laquelle la communication est ordinairement non littérale. Dans le calcul des explicitations et des implicitations, l’interlocuteur adopte le principe du moindre effort, autrement dit le processus d’interprétation s’arrête dès qu’il considère la première interprétation pertinente qu’il lui vient à l’esprit.

2.2. L’ironie dans la théorie pragmatique

D’après l’analyse pragmatique développée par Sperber et Wilson (1978), l’ironie est un écho reprenant un énoncé attribué à quelqu’un d’autre que le locuteur désapprouve pour son absurdité ou son manque de pertinence en contexte. Dans cette définition, l’écho se conçoit comme une mention implicite de l’énoncé ou de la pensée de l’autre c’est-à-dire qu’elle ne comporte aucune marque explicitant la mention, du type « il dit que », « selon x » ou « il parait que ». Les énoncés ironiques sont ainsi assimilés au style indirect libre dont le mécanisme relève de la mention de proposition le plus souvent implicite qui sur le plan de la structure de la phrase est considérée comme la plus difficile à reconnaitre.

Par ailleurs, pour Sperber et Wilson, l’ironie correspond toujours à un usage interprétatif3 tacitement dissociatif du langage dans le sens où elle permet au locuteur d’exprimer sa propre attitude de désapprobation envers l’énoncé ou l’idée mentionnée.

En tant que mention, l’ironie se déclenche comme un phénomène d’écho, mais un écho destiné non pas à rapporter un propos, mais à manifester que celui-ci a été entendu et pris en considération : en l’occurrence, l’écho ironique signale que le locuteur répercute une proposition antérieure en marquant qu’il la désapprouve parce qu’elle manque de pertinence (manque de véridicité, de justesse, d’à-propos, etc.) (Bracops, 2010 : 139)

L’écho ironique peut se manifester sous plusieurs formes. Il peut être un écho immédiat, lointain, anticipé ou l’écho d’un sous-entendu. En outre, il peut seulement être évoqué (souhait ou attente irréalisés, espoir déçu…) sans qu’il y ait un énoncé formulé précédemment l’exprimant explicitement.

L’énoncé ironique est donc l’écho plus ou moins lointain de pensées ou de propos, réels ou imaginaires, attribués ou non à des individus définis. Quant à l’interlocuteur qui cherche à interpréter un énoncé de ce type, il doit reconnaitre à la fois son caractère de mention-écho et l’attitude du locuteur vis-à-vis de la proposition mentionnée. (Bracops, 2010 : 140)

L’ironie en tant que moquerie vise une cible qui est déterminée par le processus même de l’écho. Autrement dit, la cible de l’ironie est définie en fonction de la source de la pensée dont on se fait l’écho. Il peut s’agir de personnes ou d’état d’esprits réels ou imaginaires auxquels il est fait allusion. L’avantage de cette théorie est d’expliquer comment l’ironie parvient à se moquer de l’interlocuteur direct aussi bien que d’un tiers. Vu de cet angle et contrairement à ce que stipule l’analyse classique, le décodage du sens figuré critique par un interlocuteur n’est pas indispensable au déclenchement de l’ironie, toutefois susceptible d’en renforcer l’effet. La cible peut être déterminée quand l’écho est proche et/ou précis4 ; comme elle peut être indéterminée quand il s’agit un écho lointain et/ou vague.5 On parle d’auto-ironie lorsque le locuteur se fait écho à lui-même6 et de sarcasme7 lorsqu’il fait écho à l’interlocuteur.

Par ailleurs, dans l’approche classique ou l’analyse rhétorique, l’ironie est considérée comme une transgression des normes de la communication qui est foncièrement littérale. C’est une sorte de fioriture utilisée à des fins argumentatives et qui n’a donc rien de naturel ou de spontané. Pourtant, des observations empiriques vont à l’encontre de ces considérations. En effet, l’ironie caractérise toutes les langues et les cultures du mode et elle est utilisée par les enfants dès l’âge de huit à dix ans sans qu’il y ait nécessairement un apprentissage de l’ironie comme un art rhétorique.

Enfin, le problème majeur de cette approche classique est de définir l’ironie comme l’expression du contraire de ce que l’on pense. Or, l’ironie n’exprime pas forcément, au moyen d’une antiphrase, le contraire de ce que l’on pense et énoncer le contraire de notre pensée ne conduit pas forcément à de l’ironie. Ainsi, il est parfaitement possible de faire de l’ironie en employant des énoncés qui satisfont les conditions de vérité. En d’autres termes, l’inversion spécifique à l’ironie ne réside pas dans la valeur propositionnelle de l’énoncé, mais dans l’attitude désapprobatrice par rapport à la pensée reprise en écho.

Considérons l’exemple suivant : J’adore les hommes ordonnés ! (Zufferey et Moeschler, 2010 : 139)

En rentrant chez elle, X qui trouve la maison sens dessus dessous adresse cet énoncé à son mari Y. Cet énoncé qui porte une marque d’ironie ne signifie surement pas que X déteste les hommes bien rangés, mais que son mari ne correspond manifestement pas à cette catégorie.

[…] le terme d’ironie qualifie aussi parfois, et même fréquemment dans le discours ordinaire, des énoncés à prendre littéralement, mais qui se caractérisent simplement par leurs valeurs illocutoire de raillerie (on traitera alors d’ironique tout propos moqueur, narquois, sarcastique…) : dans cette acception, l’ironie n’a rien à voir avec le trope8 ; que même lorsqu’il s’agit bien d’un trope, l’ironie comporte toujours en outre cette composante pragmatique particulière : ironiser c’est toujours plus ou moins s’en prendre à une cible qu’il s’agit de disqualifier. (Kerbrat-Orecchioni, 1986 : 102)

La théorie échoïque a pu également montrer l’origine de l’effet comique que produisent les énoncés ironiques. Cela revient à l’usage subtil qui est fait de l’implicite. En ironisant, l’énonciateur rapporte le discours ou la pensée d’un tiers tout en montrant son absurdité sans pour autant l’indiquer explicitement. L’ironiste, conscient que l’effet serait moindre s’il avait manifesté frontalement sa désapprobation, choisit l’ironie pour cette efficacité qui lui est propre.

En somme, les limites de l’analyse rhétorique ont été bel et bien dépassées par l’analyse pragmatique qui a pu surmonter les difficultés descriptives que l’analyse classique n’a pas été en mesure de résoudre et a fourni une explication unifiée aux diverses formes de l’ironie.

3. L’ironie à l’œuvre dans les titres d’El Manchar

L’analyse que nous proposons porte sur un corpus qui se compose d’énoncés qui servent d’intitulés d’articles journalistiques extraits du site internet du journal satirique El Manchar9 (https://el-manchar.com). Il s’agit d’un site d’information parodique algérien dont le slogan est « Avec des scies, on refait le monde ! ». Connu pour sa liberté de ton et son ironie mordante, le site Web publie de fausses nouvelles sur l’actualité internationale et algérienne dans un style satirique et humoristique. Si les auteurs de ces textes ont choisi le discours ironique comme mode d’expression, c’est pour marquer leur position dissociative par rapport à des discours, des comportements et des événements. En effet, selon Garric et Calas, c’est « de la divergence des points de vue [que] nait le discours ironique, qui est toujours un discours critique, un discours acerbe, visant à disqualifier un dire, une attitude ou une personne et qui se construit sur une confrontation et un divorce entre l’énonciateur et son énonciataire ». (2007 : 118)

Le choix des intitulés était aléatoire et ne répond à aucun critère de sélection autre que celui du caractère ironique desdits énoncés. Il est à signaler que les événements rapportés par ce journal relèvent synchroniquement du réel et de l’imaginaire. La créativité dont ont fait preuve les auteurs des articles n’est, en effet, saisissable que si le lecteur perçoit les subtilités discursives qui amarrent les éléments fictifs avec des événements contextuellement authentiques par le moyen d’inférences effectuées sur la base des contenus des énoncés. Cette association entre le réel et l’imaginaire accentue davantage l’absurdité de la pensée ou du comportement de la cible, ce qui a pour conséquence le renforcement de l’effet comique.

Considérant l’importance de la dimension pragmatique et cognitive dans l’interprétation de l’effet de sens ironique, nous procéderons comme suit : nous déterminerons tout d’abord la cible de l’ironie, ensuite nous préciserons le contexte sociopolitique algérien réel dans lequel s’inscrivent les discours en question et nous terminerons par relever les échos.

Premier énoncé : « De passage devant le ministère de l’Intérieur, un chat décide de retirer les formulaires de candidature » (publié le 24 janvier 2019)
La cible : Les candidats aux présidentielles du 18 avril 2019.

Le contexte : Après l’annonce de la date des élections présidentielles prévues pour le 18 avril 2019, des dizaines de candidats se sont dirigés vers le ministère de l’Intérieur, afin de retirer les formulaires de signatures individuelles indispensables à leur dossier de candidature. Dans cette masse de prétendants, seuls quelques postulants peuvent être qualifiés de sérieux de par leur statut politique. Les autres dont la majorité est totalement inconnue ont un profil plus proche du politicien-clown que de celui d’un candidat potentiel à la magistrature suprême. Ce qui est encore bizarre dans cette histoire est que les quelques candidats sérieux n’ont pas été interrogés par les médias alors que la parole a été accordée à des personnes, à l’allure parfois comique, qui faisaient des déclarations hallucinantes aussi bien les unes que les autres, par leur absurdité et parfois stupidité. Selon certains analystes et observateurs, ce spectacle est provoqué par le pouvoir en place afin de valoriser la candidature de A. Bouteflika qui, lui aussi, n’était pas apte à remplir la fonction de président de la République à cause de son état de santé.

L’écho ironique : dans cet énoncé, l’énonciateur fait écho à la candidature de ces personnages indignes ainsi qu’à l’ensemble de leurs déclarations invraisemblables en présentant un autre candidat plus saugrenu à des fins comparatives : « un chat ». Par ce choix, l’auteur se moque des présumés candidats en les comparant implicitement à l’animal qui dans ce contexte d’élections présidentielles est plus qu’insignifiant. Cela pour dire qu’en Algérie d’aujourd’hui un moins que rien peut tenter sa chance pour la présidence.

Deuxième énoncé : « Un avion d’Air Algérie contraint de faire un détour après être arrivé à l’heure » (publié le 5 janvier 2019)
La cible : la compagnie aérienne nationale, Air Algérie.

Le contexte : Avec ses retards répétés pour raison de grèves ou autre et qui parfois même se terminent par des annulations de vols, Air Algérie est une compagnie aérienne très critiquée et taxée de médiocre. Les multiples scandales dont elle a fait objet ont porté un coup et pas des moindres à son image de marque. Elle est surtout dénigrée pour le non sérieux et le manque de considération octroyé à ses clients.

L’écho ironique : ce deuxième intitulé fait écho aux retards chroniques d’Air Algérie qui sont mentionnés implicitement en les substituant par l’expression opposée « arrivé à l’heure ». Cette substitution contient toute la charge ironique dans le sens où la notion de ponctualité ne fait pas partie des standards d’Air Algérie au point où l’un de ses appareils arrivés à l’heure a été contraint de faire un détour pour ne pas enfreindre la norme si précieuse à la compagnie, le retard.

Troisième énoncé : « Après avoir lu sa lettre, le père Noël offre un Bescherelle à Ali Haddad » (publié le 24 décembre 2018)
La cible : Ali Haddad, président du Forum des chefs d’entreprises (FCE) du 27 novembre 2014 au 28 mars 2019.

Le contexte : C’est lors des sorties médiatiques d’Ali Haddad que les Algériens ont eu l’occasion de connaitre le niveau de ce dernier en communication. Ses difficultés sont principalement en langue française. Non seulement il a du mal à exprimer des idées simples dans cette langue, mais en plus il a d’énormes problèmes d’articulation de voyelles ce qui donnait parfois des mots et des phrases risibles. Un niveau que les Algériens trouvent inconcevable pour un patron des patrons. Il n’a pas d’ailleurs échappé à la raillerie de beaucoup d’internautes sur les réseaux sociaux.

L’écho ironique : dans ce troisième énoncé, il est fait allusion au niveau médiocre d’Ali Haddad en langue française que l’énonciateur tourne en ridicule. Si le nom de la cible a été explicitement mentionné, l’ironiste recourt à une mention implicite de son niveau par l’usage du mot Bescherelle qui renvoie à un ouvrage de référence en conjugaison et en grammaire. Cet ouvrage que le père Noël a décidé d’offrir à la cible après avoir lu sa lettre laisse à penser qu’elle était truffée d’erreurs.

Quatrième énoncé : « Les conteneurs d’ordures saisis étaient de la matière première destinée à la production des articles d’Ennahar ». (Publié le 6 décembre 2018)
La cible : dans cet intitulé, la cible est double ; il s’agit du groupe de média « Ennahar » et d’un homme d’affaires algérien.

Contexte : L’interprétation de cet énoncé ironique nécessite la connaissance simultanée d’informations qui se rapportent aux deux cibles :

  • Le 4 décembre 2018, les services de la douane du port de Béjaia ont découvert, des tonnes de déchets ménagers en plastique compactées et importées dans 17 conteneurs. Cette opération d’importation hors du commun a laissé les Algériens dubitatifs d’autant plus que ce ne sont pas les ordures qui manquent dans le pays où le plastique sous toutes ses formes polluant l’environnement et la nature est récupérable à volonté. Selon les services douaniers, le seul et unique objectif de l’importation de marchandises sans grande valeur est le transfert illégal de devise. L’homme d’affaires quant à lui a justifié ladite opération par « un manque criant en matières plastiques recyclables en Algérie, vu l’absence d’opérateurs qui s’intéressent à la collecte de déchets plastiques ». Il a précisé par ailleurs que les déchets importés étaient destinés à son entreprise de fabrication de sangles en plastique utilisées à maintenir les briques sur les palettes et faciliter leur transport.

  • Le groupe de média « Ennahar » (télévision et journal) est connu pour être le canal officieux de la communication gouvernementale et un instrument de propagande en faveur du pouvoir en place. En multipliant les écarts, cette chaine au service du mensonge a enterré toute honnêteté intellectuelle et conscience professionnelle. Ces journalistes sont allés jusqu’à verser dans la misogynie la plus dangereuse.

L’écho ironique : par cet intitulé, l’énonciateur fait d’une pierre deux coups. Il disqualifie à la fois l’opération d’importation des déchets et les informations d’Ennahar par la mise en relation de deux échos qui évoquent respectivement des représentations négatives. Il dénonce par le rapprochement fait entre les ordures et les articles d’Ennahar la tendance propagandiste du média. Cette propagande implicitée dans l’énoncé produit elle-même dans le sens inverse un deuxième effet ironique en condamnant davantage l’importation des ordures qui rien que par leur sens péjoratif produisent déjà un rejet.

Cinquième énoncé : « Nivea sort une crème anti-âge à base de bave de Bouteflika » (publié le 16 novembre 2018)
Cible : Abdelaziz Bouteflika, président algérien du 27 avril 1999 au 2 avril 2019.

Contexte : Abdelaziz Bouteflika est diminué physiquement depuis son accident cérébral en 2013. À la suite à cet accident, il ne s’est plus adressé au peuple algérien et ses apparitions publiques sont devenues rares. Ses multiples hospitalisations à l’étranger et notamment son image de vieillard tassé dans un fauteuil roulant ne laissent aucun doute sur son incapacité à diriger le pays. L’image qui a choqué le plus était diffusée en avril 2016 après la visite du Premier ministre français, Emanuel Valls. Lors de cette rencontre, Bouteflika est apparu avec un visage livide, les yeux hagards et la bouche entrouverte, laissant couler de la bave. Pourtant cela ne l’a pas empêché de briguer un quatrième mandat et se présenter pour un cinquième confirmant son souhait de s’éterniser au pouvoir.

L’écho ironique : l’intitulé fonctionne ici comme un écho à la pérennité de Bouteflika au pouvoir en dépit de son état de santé et son âge avancé. L’énonciateur fait allusion à ce paradoxe par ce super pouvoir qu’aurait la bave du président « éternel ». La mention de « bave » ici n’est qu’une implicitation de sa santé détériorée, une bave toutefois qui aurait des vertus rajeunissantes.

Conclusion

À travers ce bref regard sur la théorie de Sperber et Wilson et une analyse de corpus, nous montrons que l’ironie est un phénomène qui se manifeste sous forme d’écho. Un trait que nous avons choisi d’étudier sans pour autant affirmer son exclusivité. D’autres traits évoqués dans l’introduction et qui font débat parmi les théoriciens mériteraient d’être interrogés afin de mieux cerner cet objet protéiforme.

Par ailleurs, cette analyse montre toute l’importance de la dimension pragmatique dans l’interprétation des énoncés ironiques par la machine mentale du co-énonciateur. Ce dernier capte et calcule les informations implicites de l’ironie par le biais d’un processus cognitif inférentiel qui mobilise des connaissances du monde, ces savoirs antérieurs à l’énonciation indispensable à l’interprétation (les hypothèses contextuelles).

Enfin, l’ironie comme mention échoïque (implicite) optimise la pertinence du discours dans le sens où l’énonciateur communique en parallèle son attitude à l’égard des propos ou de la pensée implicitée, il produit en conséquence plus d’effets cognitifs pour peu d’effort de traitement.

1 Les implications contextuelles sont une série de déductions que suscite le processus inférentiel d’interprétation quand la pensée et l’énoncé sont

2 Grice soutient que les maximes conversationnelles sont parfois intentionnellement transgressées sans que le principe de coopération soit abandonné

3 Dans la théorie de la pertinence, l’opposition entre usage descriptif du langage (décrire des états de fait dans le monde) et usage interprétatif (

4 Exemple : « Quel temps charmant ! ». En temps pluvieux, cet énoncé ironique fait écho au propos d’un ami qui a annoncé qu’il fera beau le lendemain

5 Exemple : « Quelle belle vue ! » Cet énoncé ironique fait écho à un espoir perdu d’avoir une chambre d’hôtel avec une vue sur la mer sans qu’il ait

6 Exemple : « Je suis un vrai cordon bleu ! » Cet énoncé ironique fait écho à la médiocrité de l’énonciateur lui-même conscient du ratage du diner qu’

7 Exemple : « Ton chauffeur est toujours à l’heure, en attendant, il a une demi heure de retard ! Cet énoncé ironique fait écho à l’énoncé de l’

8 Selon Kerbrat-Orecchioni (1980), l’ironie comme trope est une antiphrase ou au moins un décalage plus ou moins net entre sens littéral et sens

9 El Manchar : un mot algérien qui signifie au sens propre « scie » et au sens figuré « critique ou médisance ».

Bracops, Martine. 2010. Introduction à la pragmatique. Bruxelles : Éditions Duculot.

Charaudeau, Patrick et Maingueneau, Dominique. 2002. Dictionnaire d’analyse du discours. Paris : Éditions du seuil.

Garric, Nathalie et Calas, Frédiric. 2007. Introduction à la pragmatique. Paris : Hachette.

Grice, P. 1989. « Logique et conversation ». In Communications, n° 30, pages 57-72.

Kerbrat-Orecchioni, Catherine. 1986. L’implicite. Paris : Armand Colin.

Kerbrat-Orecchioni, Catherine. « L’ironie comme trope ». In Poétique, n° 41, 1980, pages 108-127.

Ludwig, Pascal. 1997. Le langage. Paris : Flammarion.

Moeschler, Jacques et Auchelin, Antoine. 2009. Introduction à la linguistique contemporaine. Paris : Armand Colin.

Sperber, Dan et Wilson, Deirdre. 1989. La pertinence. Communication et cognition. Paris : Les Éditions de Minuit.

Sperber, Dan et Wilson, Deirdre. 1978. « Les ironies comme mention ». In poétique, n° 36, 1978, pages 399-412.

Zuferey, Sandrine et Moeschler, Jacques. 2010. Initiation à la linguistique française. Paris : Armand Colin.

1 Les implications contextuelles sont une série de déductions que suscite le processus inférentiel d’interprétation quand la pensée et l’énoncé sont confrontés au même contexte.

2 Grice soutient que les maximes conversationnelles sont parfois intentionnellement transgressées sans que le principe de coopération soit abandonné, qu’il s’agit dans ce cas d’une stratégie permettant la transmission d’un contenu implicite et que c’est la connaissance de cette violation par l’interlocuteur qui lui permet d’inférer le contenu implicité. Dans l’ironie par exemple, c’est la maxime de qualité qui est exploitée (faussement violée selon Grice).

3 Dans la théorie de la pertinence, l’opposition entre usage descriptif du langage (décrire des états de fait dans le monde) et usage interprétatif (moyen de représenter un autre énoncé ou une pensée) est fondamentale. […] n’importe quel énoncé peut être utilisé pour représenter des choses de deux manières. Il peut représenter un état de choses en vertu du fait que sa forme propositionnelle est vraie de cet état de choses ; dans ce cas... il est utilisé descriptivement. Ou il peut représenter une autre représentation … une pensée par exemple- en vertu d'une ressemblance entre les deux formes propositionnelles ; dans ce cas... il est utilisé interprétativement. (Sperber & Wilson, 1989 : 343).

4 Exemple : « Quel temps charmant ! ». En temps pluvieux, cet énoncé ironique fait écho au propos d’un ami qui a annoncé qu’il fera beau le lendemain

5 Exemple : « Quelle belle vue ! » Cet énoncé ironique fait écho à un espoir perdu d’avoir une chambre d’hôtel avec une vue sur la mer sans qu’il ait référence à un énoncé antérieur

6 Exemple : « Je suis un vrai cordon bleu ! » Cet énoncé ironique fait écho à la médiocrité de l’énonciateur lui-même conscient du ratage du diner qu’il vient de préparer pour ses amis

7 Exemple : « Ton chauffeur est toujours à l’heure, en attendant, il a une demi heure de retard ! Cet énoncé ironique fait écho à l’énoncé de l’interlocuteur « Mon chauffeur est toujours à l’heure » 

8 Selon Kerbrat-Orecchioni (1980), l’ironie comme trope est une antiphrase ou au moins un décalage plus ou moins net entre sens littéral et sens figuré.

9 El Manchar : un mot algérien qui signifie au sens propre « scie » et au sens figuré « critique ou médisance ».

Soraya Hadjarab

LDIEFLE-Université Batna 2

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