De la violence dans Allouma1 de Guy de Maupassant

Entre poncifs et préjugés

عن العنف في رواية ألومة للكاتب الفرنسي غي دوموباسان بين الكليشيهات و الأحكام المسبقة

Violence in Allouma by Guy de Maupassant. Between clichés and prejudices

Lamia Karrah

Citer cet article

Référence électronique

Lamia Karrah, « De la violence dans Allouma de Guy de Maupassant », Aleph [En ligne], 7 (3) | 2020, mis en ligne le 22 novembre 2020, consulté le 23 novembre 2024. URL : https://aleph.edinum.org/3155

Notre article se propose d’examiner les différentes formes de la violence verbale dans la nouvelle de Guy de Maupassant intitulée Allouma2, parue en 1889, considérée comme l’un des textes « miroir du colonialisme ». Dans son récit de voyage, Maupassant nous offre à lire un texte à travers lequel est représentée la femme orientale. La prédominance de la vision coloniale et les poncifs qui se construisent tout au long du récit cristallisent la rencontre de deux mondes donnés comme différents et inégaux : un monde moderne et un monde qualifié de primitif, et deux cultures différentes dont l’une est supérieure à l’autre. Elle est présentée particulièrement à travers une description dénigrante de Allouma, donnée comme l’archétype de la femme orientale. Nous cherchons à montrer, à travers notre analyse, comment se manifeste la violence verbale dans Allouma. Nous étudierons essentiellement le mode de construction des représentations qui mènent à l’émergence des formes de violences verbales et procédés de catégorisation négative.

يهدف مقالنا إلى معالجة مختلف أشكال العنف اللفظي في أقصوصة غي دوموباسان الموسومة ب "ألومة" التي تم نشرها سنة 1889 والتي تعد بمثابة "مرآة الاستعمار". 
ويقوم موباسان، من خلال قصة رحلته، بعرض نص يبرز المرأة الشرقية. وتبلور هيمنة النظرة الاستعمارية والكليشيهات التي تتكون طوال القصة لقاء عالمين تم عرضهما على أنهما مختلفين و غير متساويين: عالم متقدم وعالم معتبر على أنه بدائي، كما تبلور ثقافتين متباينتين: واحدة سامية و الأخرى أدنى منها مقدَّمة عبر وصف مهين لشخصية ألومة على وجه الخصوص، باعتبارها النموذج الأصلي للمرأة الشرقية.
نسعى من خلال تحليلنا إظهار الصفة التي يتجلى عبرها العنف اللفظي في رواية ألومة. و سنقوم بشكل خاص بدراسة كيفية إنشاء التصورات المؤدية إلى بزوغ أشكال العنف اللفظي وأساليب التصنيف السلبي.

Our article aims to examine the different forms of verbal violence in Guy de Maupassant’s, short story entitled Allouma, 1889, considered to be one of the texts “Mirrors of colonialism”. In this travel account Maupassant offers us to read a text through which the oriental woman is represented. The vision of the colonist and the image that are constructed throughout the story crystallise the meeting of two different words: a modern and a primitive word, two different cultures, one superior and the other presented through a denigrating description of what is the oriental women. We are trying to show how verbal violence manifests itself in Allouma? We consider that the context participates in the construction of representations which lead to the emergence of forms of violence.

Introduction

Dans le cadre de cet article, nous nous intéressons à l’image stéréotypée de l’Arabe dans la nouvelle d’Allouma, de Guy de Maupassant. Il s’agit d’une vision stigmatisée et violente donnée dans un récit de voyage dans lequel le narrateur nous raconte les aventures d’Auballe en Orient, un colon-voyageur qui rencontre une femme arabe appelée Allouma qui devient par la suite sa maitresse esclave. Allouma est une femme très belle, mais d’une faculté intellectuelle très limitée, selon la description faite par son amant. Cette femme orientale est représentée, dans cette nouvelle comme « femme-animal, femme-bête, femme-enfant ». La féminité de Allouma est automatiquement et systématiquement associée à un terme qui la réduit à une forme de sauvagerie animale ou de jeunesse naïve et immature. C’est en employant un vocabulaire disqualifiant et des qualificatifs péjoratifs que le narrateur installe une forme de violence verbale dans la représentation de l’altérité. L’autre est d’emblée placé dans une relation où il est toujours différent et inférieur, relation qui est appuyée par des termes et des jugements violents.. La présente contribution se propose de voir comment se manifeste la violence verbale dans Allouma et à travers quels procédés langagiers se cristallise-t-elle ? Nous considérons que le contexte participe de la construction des représentations lesquelles mènent vers l’émergence des formes de violences verbales et de procédés de catégorisation négative.

1. Les lieux d’inscription de la violence verbale

1.1. L’exotisme et/ou le regard colonial stigmatisant

Dans son récit de voyage, Maupassant nous invite à découvrir l’Autre qui est, selon ses propos, différent, étrange et inférieur à ce qu’est l’homme européen, civilisé. « L’infériorité de l’Arabe due à sa différence mal vue et l’impossibilité d’un rapprochement entre dominant et dominé. De là que la supériorité du Colonisateur soit dorénavant assurée et que « l’iniquité absolue de la colonisation » soit légitimement validée »3

Nous relevons un emploi abondant de stéréotypes négatifs et d’images marquées par le recours à un vocabulaire méprisant ayant une charge connotative de ce peuple « d’inconnus, mystérieux, menteurs, sournois, soumis », « perçu et désiré en tant que différent »4

Maupassant décrit dans Allouma le parcours d’un voyageur appelé Auballe qui porte un regard stigmatisant de colon européen civilisé qui ne cesse de glorifier sa civilisation tout en dénigrant un peuple colonisé dit « primitif ». En réalité, « l’Afrique est déjà présente dans l’imaginaire de Maupassant avant d’être rencontrée (…) L’Afrique imaginaire de Maupassant est donc faite aussi de stéréotypes. »5

Nous avons à lire, dans cette nouvelle, un discours orientaliste, défini par E. Saïd comme

« Un savoir et un imaginaire issus d’une position de puissance. Ce savoir et cet imaginaire ont été institutionnalisés et construits discursivement pendant des siècles par l’Occident. Ils traduisent une vision dichotomique qui oppose un « nous », référence de toutes les valeurs et un « eux », appelé Orient, qui se distingue par une altérité excessive. »6

Ce colonisateur-voyageur part à la découverte d’une terre qui le séduit, et d’êtres qui le marquent de par leur culture, leurs comportements paradoxaux, leur mode de vie et leur religion. Auballe souligne :

« Nous ne savons pas davantage ce qui se passe sous cette hutte de branches et sous ce petit cône d’étoffe cloué sur la terre avec des pieux, à vingt mètres de nos portes, que nous ne savons encore ce que font, ce que pensent, ce que sont les Arabes dits civilisés des maisons mauresques d’Alger. Derrière le mur peint à la chaux de leur demeure des villes, derrière la cloison de branches de leur gourbi, ou derrière ce mince rideau brun de poil de chameau que secoue le vent, ils vivent près de nous, inconnus, mystérieux, menteurs, sournois, soumis, souriants, impénétrables. Si je vous disais qu’en regardant de loin, avec ma jumelle, le campement voisin, je devine qu’ils ont des superstitions, des cérémonies, mille usages encore ignorés de nous, pas même soupçonnés ! Jamais peut-être un peuple conquis par la force n’a su échapper aussi complètement à la domination réelle, à l’influence morale, et à l’investigation acharnée, mais inutile du vainqueur. »7

Dans sa préface à Exotisme et création, Roland Antonioli définit l’exotisme et souligne que « ce que l’on perçoit d’abord, à l’origine de l’exotisme, c’est la magie des terres lointaines, des lieux fascinants ou interdits, ouverts à l’espace du désir ou de l’aventure »8 séduit par la nature et le paysage, mais non pas par les habitants, il nous laisse lire dans cet extrait des clichés coloniaux qui sont venus en Afrique pour lui apporter civilisation et culture. Cela suppose qu’il s’agit d’un peuple sauvage et ignorant. La représentation de l’opposition Même et Autre laisse voir un discours violent à travers lequel l’auteur construit des poncifs négatifs sur ce que sont le peuple arabe et la société arabo-musulmane conquis par l’Européen civilisé moderne et supérieur.

« Le discours colonialiste a créé une image négative de l’Orient, cela est incontestable. Dans l’idée même de mission civilisatrice persiste la conscience de la supériorité occidentale, cela est également vrai, mais outre que le discours colonial n’est pas figé dans le temps et dans l’espace, il faut reconnaître que la conscience nationale est née précisément de l’opposition à l’occupant et que l’occupant lui-même a découvert l’Autre dans la résistance qu’il lui a opposée. »9

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1.2. Le mensonge : d’une forme de violence au procédé de généralisation

Ce que regrette l’amant d’Allouma c’est le fait qu’elle ment beaucoup, mais pas uniquement Allouma qui est considérée comme menteuse, l’amant généralise ce comportement et le considère comme une « seconde nature chez ce peuple qui ment avec ou sans motif ». Auballe a eu recours à maintes reprises au procédé de généralisation, « chaque défaut réel ou supposé, de l’accusé est étendu à tous ses semblables ; [...] l’accusé est condamné au nom d’un défaut collectif, sous-entendu »10 et au procédé de justification afin d’insister sur l’image supérieure du colon en accentuant la différence entre les deux mondes dont l’un est moderne et civilisé et l’autre arriéré et barbare.

Allouma et son peuple sont mythomanes tel est l’image que donne le narrateur à un peuple sans le connaître, peut être, ou tout en le méprisant et ce en considérant qu’il ne dit jamais la vérité, ou invente des histoires lorsqu’il parle ou donne des informations. Il souligne :

« Elle comprit qu’il fallait parler et me conta son histoire, ou plutôt une histoire, car elle dut mentir d’un bout à l’autre, comme mentent tous les Arabes, toujours, avec ou sans motifs »11

Nous pouvons supposer aussi qu’Allouma et son peuple ne soient pas sincères, ils cachent toujours des choses. « J. R. Searle revient sur la “condition de non sincérité” selon le type d’acte de langage considéré. Au niveau des assertifs, le mensonge apparaît quand il y a contradiction entre le contenu du dire et la croyance du locuteur. »12 Il se définit

«  couramment comme une parole différente de la pensée de celui qui l’énonce. Le mensonge est, avant tout, mauvaise foi. Cette définition permet d’abord de distinguer, dans les formes que prend le faux, le mensonge de l’erreur, qui est de bonne foi, car conforme à la pensée de celui qui la commet. Elle permet aussi de remarquer qu’on peut parfois mentir tout en disant, par erreur donc involontairement, la vérité, si on avait justement l’intention de ne pas la dire. Ainsi l’élève qui cherche à “couvrir” son camarade absent en le disant malade, ce qu’il croit faux, mais qui est vrai, commet bien un mensonge. Le mensonge est donc essentiellement intention de tromper, c’est-à-dire de dissimuler sa pensée. »13

Le narrateur va au-delà du « mensonge » pour essayer de « trouver » les raisons pour lesquelles ces hommes mentent. Il s’agit d’un peuple auquel on ne peut pas faire confiance « on ne peut se fier à leurs dires. », car ils ne peuvent pas vivre sans « mensonge ». Il s’agit donc d’êtres non fiables qui n’inspirent pas confiance. La seule solution réside, selon le narrateur, dans le fait de rester longtemps avec eux et d’essayer de les comprendre afin de « savoir combien le mensonge fait partie de leur être, de leur cœur, de leur âme ». Il souligne :

« C’est là un des signes les plus surprenants et les plus incompréhensibles du caractère indigène : le mensonge. Ces hommes en qui l’islamisme s’est incarné jusqu’à faire partie d’eux, jusqu’à modeler leurs instincts, jusqu’à modifier la race entière et à la différencier des autres au moral autant que la couleur de la peau différencie le nègre du blanc, sont menteurs dans les moelles au point que jamais on ne peut se fier à leurs dires. Est-ce à leur religion qu’ils doivent cela ? Je l’ignore. Il faut avoir vécu parmi eux pour savoir combien le mensonge fait partie de leur être, de leur cœur, de leur âme, est devenu chez eux une sorte de seconde nature, une nécessité de la vie »14

Auballe présuppose que c’est la religion qui a fait que ces « indigènes » soient des menteurs, dans cet extrait nous relevons un nombre de suppositions et des jugements de valeur non fondés, regard méprisant porté sur ces êtres primitifs sans culture. Il va même jusqu’à la transformation du mensonge en fait de nature comme s’il s’agit d’une question d’hérédité tout comme « la couleur de la peau ». Mais pourquoi ce colonisé ment-il toujours ? Est-ce qu’il s’agit d’une stratégie de fuite ? Est-ce qu’il le fait pour se protéger contre le colonisateur méconnu ? Est-ce qu’il le fait pour préserver une situation, un travail chez le colon ?

« Surprenant » et « incompréhensible »  sont les qualificatifs employés par Auballe afin de décrire l’un des caractères de « l’indigène » le mensonge et son essence génèrent une question à laquelle il n’a pas trouvé de réponse satisfaisante. Il s’agit d’une race qui a suscité la curiosité de l’auteur qui a tenté de la découvrir dans ce récit de voyage. « Race » qualifiée d’étrange, d’incompréhensible, de menteuse, ce qui implique que montre bien que l’auteur installe les deux sociétés dans une relation asymétrique. L’Arabe forcément différente et inférieure à l’européenne. Tous ces qualificatifs et stéréotypes traduisent la vision raciste institutionnalisée d’une époque où tout concoure à justifier la domination de l’Afrique dite « incivilisée et arriérée ».

1.3. L’amour : émotion interdite à la femme arabe

Les sentiments qu’a Auballe pour Allouma ne sont pas ceux d’un amoureux pour une femme, mais un homme pour une créature superficielle, un animal en quelque sorte qu’il s’agit de dompter, de soumettre comme on le ferait d’un objet de désir. Un être très limité considéré comme « nul », mais charmant. Allouma peut le quitter à n’importe quel moment comme elle peut coucher avec d’autres hommes, il en est conscient, mais pas jaloux, car pour lui la jalousie naît uniquement avec l’amour, mais dans son cas, il ne s’agit pas d’une relation amoureuse, d’où l’emploi de la négation, de la réduction et du dénuement à plusieurs reprises dans cet extrait. Il souligne :

« Je ne l’aimais pas — non — on n’aime point les filles de ce continent primitif. Entre elles et nous, même entre elles et leurs mâles naturels, les Arabes, jamais n’éclôt la petite fleur bleue des pays du Nord. Elles sont trop près de l’animalité humaine, elles ont un cœur trop rudimentaire, une sensibilité trop peu affinée, pour éveiller dans nos âmes l’exaltation sentimentale qui est la poésie de l’amour. Rien d’intellectuel, aucune ivresse de la pensée ne se mêle à l’ivresse sensuelle que provoquent en nous ces êtres charmants et nuls »15

Cet extrait laisse voir un discours violent marqué par un vocabulaire réduisant Allouma à un animal. L’auteur a recours au procédé de généralisation ; tous les Arabes sont pareils. Cette dualité du Même supérieur à l’Autre qui dénie toute forme d’humanité à Allouma et aux siens, marque un regard réducteur du colon qui emploie l’adverbe du temps « jamais » pour juger « les Arabes » dévalorisés qui « ont un cœur trop rudimentaire, une sensibilité trop peu affinée ». La répétition de l’adverbe intensif « trop », alliée aux termes « primitif », « animalité humaine », « rudimentaire », « peu affinée », tous péjoratifs ici, traduit le sentiment de supériorité méprisant d’Auballe. La supériorité de ce dernier a été marquée par l’emploi de « Nous », et ce pour marquer aussi une certaine distanciation entre les deux races différentes, ainsi et selon les propos de Memmi nous pouvons dire que « l’infériorité du Colonisé démontre d’une manière éclatante la supériorité du Colonisateur »16, ce qui approfondit le fossé entre le Même et l’Autre.

Les femmes arabes ne peuvent pas aimer ou n’ont pas le droit d’aimer, car elles sont réduites à des objets de désir et de passions passagères. Elles sont, selon le narrateur, primitives et n’ont aucune faculté intellectuelle « Rien d’intellectuel ». Allouma cet esprit libre, cet être « charmant » et inférieur ne pourra en aucun cas susciter une connexion sentimentale qui va au-delà du simple plaisir sexuel et amènerait l’Autre à l’aimer, et/ou à s’accrocher à son cœur. Elle ne peut vivre que des moments éphémères, cet objet « primitif, animalisé et nul » n’a d’autre mission que de satisfaire un besoin physique du colon ou d’autres hommes croisés sur son chemin.

Le narrateur dresse un portrait stéréotypé du colonisé vu comme un être inférieur, et disqualifié. Il s’agit d’un colonisé dénué de toute faculté intellectuelle et de tout sentiment noble. Il est ainsi animalisé dans toute la nouvelle. Les désignatifs sont chargés de connotations liées aux préjugés sociopolitiques et socioculturels de l’époque et qui ont servi de base à la domination coloniale.

1.4. Allouma : Paradoxe fanatique et résistance

Allouma est une femme qui aime la liberté et la nature, c’est une prostituée qui se déplace d’un lieu à un autre et suit son instinct et sa passion. Elle a un seul atout : sa capacité à séduire les hommes. Cet être « inférieur » qui vit de la prostitution est décrit comme disposant d’une faculté intellectuelle limitée par le narrateur qui n’hésite pas à nous démontrer le paradoxe dans lequel Allouma vit. Cette femme ne maîtrise qu’un seul langage, celui du corps, mais elle respecte le mois sacré du ramadan et refuse la proposition d’Auballe de l’embrasser. Ce dernier réagit avec ironie en riant et cherche à savoir pourquoi elle refuse de répondre à ses envies résiste et dit NON à son maître. Il souligne :

« Le soir, je la fis venir et je la vis entrer avec un air
soucieux qu’elle n’avait point d’ordinaire.
— Assieds-toi là, lui dis-je en lui montrant sa place sur le divan, à mon côté.
Elle s’assit, et comme je me penchais vers elle pour
l’embrasser elle éloigna sa tête avec vivacité.
Je fus stupéfait et je demandai :
— Eh bien, qu’y a-t-il ?
— C’est Ramadan, dit-elle.
Je me mis à rire.
— Et le Marabout t’a défendu de te laisser embrasser
pendant le Ramadan ?
— Oh oui, je suis une Arabe et tu es un Roumi !
— Ce serait un gros péché ?
— Oh oui ! »17

Paradoxalement, cette femme même si elle offre son corps à tout moment et à n’importe qui, semble avoir des principes et refuse d’avoir des rapports pendant le mois de « Ramadan », car c’est interdit et considéré comme « un gros péché ». Ce qui, pour le narrateur, montre le poids de la religion. Le narrateur relie cette attitude à la superstition dont fait preuve le colonisé. À aucun moment il ne soulève le paradoxe qui fait que cette femme dominée a eu la liberté et « le droit d’apprendre sa langue, d’exercer en toute liberté sa religion, de reconnaître son passé culturel » et qui sont autant de manières d’affirmer un refus de l’exploitation ».18

Encore une fois, le narrateur dépeint Allouma comme une femme ignorante. Le ton ironique du passage « Je me mis à rire » démontre à quel point Auballe dévalorise et porte un regard stéréotypé sur ce qu’est la culture de l’Autre. Ce rire moqueur et ironique, symboliquement très violent, dénote le mépris que le sujet énonciateur a pour cette « femelle » et sa religion. L’ironie est considérée comme « la figure par laquelle on veut faire entendre le contraire de ce qu’on dit : ainsi les mots dont on se sert dans l’ironie ne sont pas pris dans le sens propre et littéral »19 comme elle consiste à dire, « par raillerie plaisante, ou sérieuse, le contraire de ce qu’on pense, ou de ce qu’on veut faire penser. Elle semblerait appartenir plus particulièrement à la gaieté ; mais la colère et le mépris l’emploient aussi quelquefois, même avec avantage ; par conséquent, elle peut entrer dans le style noble et dans les sujets les plus graves »20.

Poser cette question « le Marabout t’a défendu de te laisser embrasser pendant le Ramadan ? » N’est autre qu’une forme de mépris et de dévalorisation des capacités mentales de « la femme - bête », qui se trouve incapable de raisonner, et ne maîtrise que le langage du corps, et le don de ce même corps. Allouma apparaît comme une femme limitée, paradoxale et hypocrite qui attend qu’on lui dicte ses actes.

Ce récit nous donne une image stéréotypée et stigmatisée de la femme arabe dans « le rôle de prostituée » et le regard que pose sur elle un voyageur, qui tout au long du récit dresse, à travers des termes violents, un portrait physique et moral disqualifiant et réducteur. À travers cette procédure écrivante, nous concevons le « stéréotype comme une sorte de croyance ou de représentation, représentation qui concerne un groupe et ses membres, tandis que le préjugé — souvent confondu avec les stéréotypes — désigne plutôt l’attitude adoptée envers les membres du groupe en question »21

Le Même # L’Autre supériorité/infériorité

L’amant # Allouma exploitation/obéissance, objet de désir, soumise

Roumi # Arabe race noble civilisée/peuple arriéré et sauvage

Foi chrétienne # Foi musulmane franchise/Hypocrisie

1.5. Allouma : Une Orientale animalisée et violentée

Un procédé discursif d’animalisation a été introduit dans la nouvelle d’Allouma par le biais de l’emploi d’un vocabulaire dévalorisant toutes les facultés de l’être humain afin d’insister sur la supériorité du colonisateur et de sa race.

Allouma a été réduite à de la chair qui ne sert qu’à satisfaire le plaisir d’un colon qui la considère comme une « bête saine (…) Qui a un sourire animal ». Afin de décrire Allouma, Auballe a eu recours à ce qu’on appelle la figure de ressemblance introduite par l’emploi du procédé de rabaissement qu’est l’animalisation d’un être humain. Cet être à la « cervelle d’écureuil » est considéré comme ignorant, incapable de raisonner, même s’il aspire toujours à la liberté. Il souligne

« Elle me la conta par détails incohérents qui semblaient surgir au hasard dans une mémoire en désordre ; et elle y mêlait des observations délicieusement puériles, toute une vision du monde nomade née dans une cervelle d’écureuil qui a sauté de tente en tente, de campement en campement, de tribu en tribu. »22

Allouma est comparée à un enfant, car elle fait des « observations puériles » ce qui dénote le caractère superficiel et limité de la femme — bête, qui est toujours infantilisée et qui n’accède pas à l’intellectualité. Mais elle reste une femme libre, qui a le pouvoir de se déplacer et d’aller loin, à disparaître et réapparaître quand elle désire. Elle a été comparée à la « gazelle » belle et rapide, personne ne peut l’atteindre lorsqu’elle s’éloigne.

Il souligne : « Puis il ajoutait le mot arabe “r’ézale” qui veut dire “gazelle”, comme pour exprimer qu’elle courait vite et qu’elle était loin. »23

Cette « rodeuse de sable », infidèle à son amant, a réussi, malgré ses facultés intellectuelles limitées, à pousser Auballe à s’attacher à elle et à son corps : « je l’aimais en effet, un peu comme on aime un animal très rare, chien ou cheval, impossible à remplacer. C’était une bête admirable, une bête sensuelle, une bête à plaisir qui avait un corps de femme »24. Cette infidélité rapproche en fait la femme orientale-arabe, encore une fois, de la bête. Comme l’affirme d’ailleurs Jennifer Yee : « L’infidélité de la maîtresse indigène est naturelle puisqu’elle est appelée, par ses “chaleurs” comme la jument, comme la chienne) au mâle de son espèce »25 » « .

Allouma a été déshumanisée, dans tout le récit, par différents procédés, et ce dans le but de la montrer comme appartenant à une race inférieure qui a d’innombrables défauts : le mensonge, l’infidélité, la bestialité, l’hypocrisie, l’absence de facultés intellectuelles, la soumission à la religion, etc., ce qui donne un statut supérieur au colonisateur civilisé, intelligent, sincère. Ce genre de “femme -bête”, “on ne peut pas les aimer comme des êtres humains”26 Auballe considère sa maitresse comme un animal qu’il possède, mais il s’agit d’un animal précieux et rare, “impossible à remplacer”.

Cette Allouma est toujours animalisée, humiliée et dégradée, dans le récit, cette humiliation est marquée par l’emploi des qualificatifs péjoratifs “chien, animal, bête,” marquant la vision raciste du colonisateur qui est, lui, présenté toujours comme supérieur.

“En gros, il s’agit d’une déshumanisation progressive. Le raciste caractérise sa victime par une série de traits surprenants : elle serait incompréhensible, opaque, mystérieuse, étrange, inquiétante, etc. Lentement, il en fait une espèce d’animal ou de chose ?”27

Pour conclure…

Nous avons essayé à travers notre analyse de la nouvelle de Guy de Maupassant, Allouma, de mettre la lumière sur l’ensemble des procédés langagiers qui nous laissent voir un discours violent qui matérialise dans la langue, l’intolérance d’un colon-voyageur.

Maupassant nous a fait un portrait moral et physique réducteur et méprisant de la femme orientale arabe, à travers le recours à des stéréotypes et des poncifs négatifs qui ont été construits dans des discours de l’époque, autant littéraires que scientifiques, pour décrire tout un peuple.

Le contexte de la rédaction du récit de voyage coïncide avec la période coloniale, ce qui justifie, à notre sens, le recours aux qualifications péjoratives définies comme “toute forme axiologiquement négative utilisée pour qualifier de façon dépréciative un individu quelconque, que cet individu soit présent ou absent”28 Nous avons essayé de dégager les différentes images stéréotypées de l’Arabe qui se sont construites à travers le principe de l’opposition du Même et de l’Autre. L’un présenté comme supérieur et l’Autre qualifié d’inférieur. Cette opposition, alimentée de clichés, invite à conclure, à partir de “cette impression pessimiste qu’aucune rencontre, aucune possibilité de dialogue n’existe entre deux êtres de pays { …] différents”29

“[… J la vraie question est celle-ci : peut-il y avoir une représentation fidèle de quoi que ce soit ? Ou encore, une certaine représentation, toutes tes représentations, parce qu’elles sont des représentations, ne sont-elles pas d’abord enchâssées dans la langue, puis dans la culture, les institutions, tout le climat politique de celui qui les formule ? Si c’est bien le cas (ce que je crois), nous devons alors être prêts à accepter le fait qu’une représentation est ipso facto impliquée, entrelacée, enchâssée dans beaucoup d’autres choses en dehors de la ‘vérité’, qui es elle-même une représentation »30

1 « Dans la nouvelle intitulée Allouma, Maupassant le narrateur raconte ce qui s’est passé avec son ami Auballe et comment celui-ci fit connaissance

2 Guy de Maupassant : Allouma. Texte publié dans L’Écho de Paris du 10 au 15 février 1889, puis publié dans le recueil La main gauche (pp. 1-64). Il a

3 Memmi, Albert, L ‘homme dominé, Éditions Gallimard, France, 1968, P 61.

4 Vincenette Maigne « Exotisme : évolution en diachronie du mot et de son champ sémantique », in Exotisme et création, L'Hermès/Université Jean Moulin

5 Soubias, Pierre, « La place de l’Afrique dans l’imaginaire de Maupassant. Une lecture des nouvelles africaines », in Maupassant multiple, Presses

6 Rabâa Abdelkéfi, « La représentation de l'Occident dans L’Orientalisme d'Edward Said : théorie ou discours idéologique ? », paru dans Loxias, Loxias

7 Guy de Maupassant, Allouma, [En ligne], http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

8 Exotisme et création, Actes du colloque international (Lyon 1983) ; préface de Roland ANTONIOLI, L’Hermès, Lyon, 1985, préface de Roland ANTONIOLI

9 Rabâa Abdelkéfi, « La représentation de l'Occident dans L’Orientalisme d'Edward Said : théorie ou discours idéologique ? », paru dans Loxias, Loxias

10 Memmi, Albert, L‘homme dominé, Éditions Gallimard, France, 1968, P 35.

11 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

12 André Petit jean, « Du mensonge et de sa problématisation : illustration à partir de l’œuvre de Bernard Marie Koltès », Pratiques [En ligne]

13 « Le Mensonge » [En ligne], https://frama.link/jqoLw9Lj

14 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne : http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

15 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

16 Memmi, Albert, L‘homme dominé, Éditions Gallimard, France, 1968, P 52.

17 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

18 Catherine Delacroix, Espoirs et réalités de la femme arabe, l’Harmattan, Paris, 1986, PP52-53.

19 Hamon, Philippe, L’ironie littéraire, essai sur les formes obliques de l’écriture oblique, Hachette Livre, Paris, 1996, P19.

20 Fontanier, Pierre, Les figures du discours, Flammarion, Paris, 1977, PP 145-146.

21 Amossy, Ruth, Herschberg Pierrot, Anne, stéréotypes et clichés, Armand Colin, Paris, 2005, PP 34-35.

22 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne : http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

23 IDEM

24 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne : http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

25 Jennifer Yee, Clichés de la femme exotique, l’Harmattan, Paris, 2000, P. 262.

26 Yvonne Knibiehler, Régine Goutalier, La femme au temps des colonies, Editions Stock, France, 1985, P. 38.

27 Memmi, Albert, L‘homme dominé, Éditions Gallimard, France, 1968. P. 200.

28 Laforest, M., Vincent, D., «  La qualification péjorative dans tous ses états » Langue française, Vol. 144, 2004, P 63.

29 Lahjomri Abdeljelil, L ‘image du Maroc dans la littérature française (De Loti à Montherlant), S.N.E.D., Alger. 1973, P. 292.

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1 « Dans la nouvelle intitulée Allouma, Maupassant le narrateur raconte ce qui s’est passé avec son ami Auballe et comment celui-ci fit connaissance avec sa copine Allouma. Il s’agit donc d’un récit cadre où le Je est, en même temps, celui de Maupassant l’écrivain, le narrateur et le personnage, et d’un récit interne où le Je est celui de son ami Auballe, le protagoniste de l’histoire racontée. » In https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/bitstream/handle/1866/15109/Samwail_Ghada_2004_memoire.pdf?sequence=1&isAllowed=y

2 Guy de Maupassant : Allouma. Texte publié dans L’Écho de Paris du 10 au 15 février 1889, puis publié dans le recueil La main gauche (pp. 1-64). Il a également été repris dans La Vie populaire des 23 et 26 mai 1889 et dans le recueil Contes choisis (pp. 1-30), paru en février 1892

3 Memmi, Albert, L ‘homme dominé, Éditions Gallimard, France, 1968, P 61.

4 Vincenette Maigne « Exotisme : évolution en diachronie du mot et de son champ sémantique », in Exotisme et création, L'Hermès/Université Jean Moulin-Lyon 3, 1985, P. 13.

5 Soubias, Pierre, « La place de l’Afrique dans l’imaginaire de Maupassant. Une lecture des nouvelles africaines », in Maupassant multiple, Presses Universitaires du Mirail, Actes du colloque de Toulouse 13-15 décembre 1993, Toulouse, 1995, P. 32.

6 Rabâa Abdelkéfi, « La représentation de l'Occident dans L’Orientalisme d'Edward Said : théorie ou discours idéologique ? », paru dans Loxias, Loxias 24, mis en ligne le 15 mars 2009, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html?id=2700.

7 Guy de Maupassant, Allouma, [En ligne], http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

8 Exotisme et création, Actes du colloque international (Lyon 1983) ; préface de Roland ANTONIOLI, L’Hermès, Lyon, 1985, préface de Roland ANTONIOLI, P :3 cité par Samwail, Ghada, L’image de l’autre dans les écrits sur le Maghreb, 2004, PP 14- 15 .

9 Rabâa Abdelkéfi, « La représentation de l'Occident dans L’Orientalisme d'Edward Said : théorie ou discours idéologique ? », paru dans Loxias, Loxias 24, mis en ligne le 15 mars 2009, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html?id=2700.

10 Memmi, Albert, L‘homme dominé, Éditions Gallimard, France, 1968, P 35.

11 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

12 André Petit jean, « Du mensonge et de sa problématisation : illustration à partir de l’œuvre de Bernard Marie Koltès », Pratiques [En ligne], 163-164 | 2014, mis en ligne le 31 décembre 2014, consulté le 14 novembre 2019. URL : http://journals.openedition.org/pratiques/2295 ; DOI : 10.4000/pratiques.2295.

13 « Le Mensonge » [En ligne], https://frama.link/jqoLw9Lj

14 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne : http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

15 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

16 Memmi, Albert, L‘homme dominé, Éditions Gallimard, France, 1968, P 52.

17 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

18 Catherine Delacroix, Espoirs et réalités de la femme arabe, l’Harmattan, Paris, 1986, PP52-53.

19 Hamon, Philippe, L’ironie littéraire, essai sur les formes obliques de l’écriture oblique, Hachette Livre, Paris, 1996, P19.

20 Fontanier, Pierre, Les figures du discours, Flammarion, Paris, 1977, PP 145-146.

21 Amossy, Ruth, Herschberg Pierrot, Anne, stéréotypes et clichés, Armand Colin, Paris, 2005, PP 34-35.

22 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne : http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

23 IDEM

24 Guy de Maupassant, Allouma, En ligne : http://maupassant.free.fr/textes/allouma.html

25 Jennifer Yee, Clichés de la femme exotique, l’Harmattan, Paris, 2000, P. 262.

26 Yvonne Knibiehler, Régine Goutalier, La femme au temps des colonies, Editions Stock, France, 1985, P. 38.

27 Memmi, Albert, L‘homme dominé, Éditions Gallimard, France, 1968. P. 200.

28 Laforest, M., Vincent, D., «  La qualification péjorative dans tous ses états » Langue française, Vol. 144, 2004, P 63.

29 Lahjomri Abdeljelil, L ‘image du Maroc dans la littérature française (De Loti à Montherlant), S.N.E.D., Alger. 1973, P. 292.

30 Said, Edward W, L’Orientalisme, L ‘Orient crée par l’Occident, Seuil, Paris, 1980, P 304.

Lamia Karrah

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